mercredi 24 septembre 2014

Preuves de l'existence de Dieu

Depuis que le christianisme existe, des théologiens ou philosophes se sont obstinés à donner des preuves de l’existence de Dieu.
Ils ont qualifié ces preuves par des noms très savants comme la preuve ontologique, la preuve cosmologique ou la preuve téléologique. Les définitions sont très précises (voir les explications sur Wikipédia). Ces démonstrations sont très savantes. Elles nécessitent l’usage de la raison. J’avoue que je m’y perds et que je ne les retiens jamais. Elles me laissent assez froide. Parce qu’elles en appellent à l’intellect, le cœur m’y paraît exclu. 
Par exemple, le philosophe Descartes au VII siècle (instruit à l’école des Jésuites de La Flèche), est l’inventeur du cartésianisme donc le grand promoteur de la raison, de la logique mais aussi du doute hyperbolique. Il se sent obligé de prouver l’existence de Dieu par des arguments imparables (indiscutables). Descartes se rappelant l’affaire Galilée ne veut surtout pas froisser la sainte inquisition.

À cet égard, le philosophe Pascal, un génie en mathématique exceptionnel du XVII siècle qui n’est jamais allé à l’école (qui étaient tenues par des Jésuites ; son père éduquait lui même ses enfants), s’est converti (à la suite de plusieurs drames personnels). Il comprend que l’existence de Dieu ne se démontre pas mais est une expérience intérieure qui échappe à la raison. Ce que j’aime bien chez Pascal, c’est qu’il est l’inventeur des trois ordres : l’ordre du corps, l’ordre de l’esprit au sens de l’intelligence et enfin l’ordre du cœur, le champs de la foi. Ces trois ordres sont indépendants mais hiérarchique. L’ordre du cœur domine, l’ordre de l’esprit, qui lui même contrôle l’ordre du corps. Certaines vies humaines se limitent qu’à connaître seulement l’ordre du corps. On peut être très intelligent et demeurer absolument insensible à l’ordre du cœur.
(En aparté, Pascal est devenu Janséniste et s’est affronté aux Jésuites au cours de polémiques épistolaires très virulentes. À cette époque, la rigueur religieuse des Jésuites s’était très assouplie face au pouvoir et à l’argent. Je ne comprends pas trop comment le grand Pascal s’est laissé entrainé dans des polémiques qui prenaient un tournant intégriste radical. Mais nul n’est parfait).

À notre époque moderne, on oublié les preuves d’autorité de la raison sur l’existence de Dieu. La contradiction vient des sciences historiques (et de la paléontologie) qui mettent en difficulté les faits bibliques de l’ancien et nouveau testaments.
Je suis en train de lire avec intérêt le livre « Le Royaume » d’Emmanuel Carrère. Ce livre commence par le récit de la conversion de l’auteur. Puis pour nourrir sa vive foi, l’auteur se lance dans une enquête historique très approfondie sur St Paul et Luc. J’apprends beaucoup sur cette période méconnue du début du christianisme. Je partage quelques doutes sur la parfaite authenticité des témoignages de certains auteurs. Je peux imaginer les conflits d’intérêt et d’exclusivité entre les « vedettes » concurrentes de la première évangélisation. L’auteur laisse dérouler l’histoire, puis reprend le contrôle de la narration pour exprimer ses doutes et ses troubles. Ses découvertes historiques font vaciller sérieusement sa foi première. Il n’est pas certain d’avoir tout perdu de sa foi originale.

Pour moi, les preuves historiques rejoignent les preuves intellectuelles ontologiques, cosmologiques et téléologiques. Elles appartiennent à l’ordre de l’esprit comme dirait Pascal. Elles n’enseignent rien sur ce qui est de l’ordre du cœur (« Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point ».).

La foi est une expérience intérieure qui ne peut aucunement prouvée à l’extérieur. Quand bien même des transformations intérieures peuvent conduire à des miracles manifestes comme des guérisons spontanées, des visions ou autres manifestations étonnantes, elles ne constituent pas des preuves. De ce côté là, je trouve que l’église est raisonnable de ne pas fonder la foi sur des miracles. La foi est bien plus qu’une simple croyance dans des faits. Elle est aussi une transformation intérieure, un soupçon de l’existence de l’âme.

Peut être bien que ma foi évolue. Elle devient moins philosophique et plus spirituelle et poétique. Les métaphores et les oxymores me sensibilisent bien plus que les idées maintenant. Sans avoir terminé le livre « le Royaume », je pense aux autres évangélistes comme Jean, qui a certainement connu Jésus de son vivant (« le disciple que Jésus aimait ? »). Je suis toujours fascinée par le Prologue de Jean, par le vocable de Verbe ou de Parole ou de Logos. C’est aussi cette idée de cette Parole de vie qui hante l’œuvre de Maurice Bellet.
Appréciant le poète Christian Bobin, j’avais commandé quelques livres de son maitre d’inspiration, le poète Jean Grosjean il y a quelques mois. Cependant je ne les ai pas ouverts immédiatement car j’étais alors plongée dans d’autres lectures. Puis alors que je résistais à la vérité historique énoncée par Emmanuel Carrère sur St Paul, j’ouvre machinalement « l’Ironie Christique » de Jean Grosjean qui propose un commentaire poétique de l’Évangile de Jean.

De nouveau, je sens que la Parole me saisit de nouveau le cœur, comme elle opère mystérieusement sur moi dans les livres de Guy Coq ou de Maurice Bellet. Me voilà complètement subjuguée. La lecture est lente, appliquée, pas facile mais belle ; Chaque phrase, chaque porte son poids lourd de sens. Je relis plusieurs fois les chapitres. Le poète m’ouvre aux énigmes, aux mystères et à la beauté de cet Évangile en les éclairant de la lumière de son langage. Pour moi, la Foi n’a que peu ou pas de rapport avec l’Histoire. À trop vouloir cerner cette dernière, les faits en viennent à troubler la foi comme l’eau transparente devient floue quand on y plonge la main en générant ondes et miroitements à sa surface. Il faut lâcher prise à toute science du savoir et se laisser transporter de l’intérieur.



Emylia

7 commentaires:

  1. Bonjour Emylia,

    J'ai bien lu ce nouveau texte. Comme je vous l'écrivais, je viens de laisser mes cogitations à la suite de "une chaîne sacrée".

    Pour celui-ci, je dis comme vous qu'il n'y a pas de preuve de l'existence de Dieu.
    Je crois que Descartes était sincèrement croyant , mais même un croyant sincère ont dû se méfier de l'Inquisition(ex. Th; d'Avila ...). Le doute qu'il préconise porte sur d'autres sujets que la foi, au moins autant que je sache.
    Foi et raison ne s'opposent pas comme l'a montré récemment Benoit XVI.
    Bonne journée.
    Thérèse.

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  2. Bonjour à tous,

    Je ne ferai pas paraitre de nouvel article samedi prochain, laissant le temps de digérer les deux précédents.
    Merci et bonne journée.

    Emylia

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  3. Merci, car effectivement, pour ma part, je commençais à avoir du mal à suivre le rythme. Th.

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  4. Bonsoir à tous,

    Ce soir, je suis ravie, car un jeune de ma connaissance, autiste Asperger, à force de courage et de ténacité, vient de décrocher son bac à session de rattrapage en septembre, donc aujourd'hui.
    Son problème n'avait été médicalement diagnostiqué avant 16 ans (on sait que cette maladie est sous-dépistée en France).
    J'avais partagé les inquiétudes des parents. La solidarité familiale a permis cet exploit inouï.
    La vie redevient possible et ne s'arrête pas devant le mur du bac.

    Bonne soirée à tous.

    Emylia

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  5. Bonjour,

    Je suis ravie aussi Emylia. J'imagine sa joie! et la joie des parents !

    je vais montrer votre message d'aujourd'hui à une grand-mère de mon entourage. Sa petite-fille est autiste aussi. autiste Asperger ? Je ne sais pas, elle non plus- peut-être- mais en tout cas, elle suit une scolarité normale alors que les autorités dans le domaine voulaient la mettre dans une classe pour déficients intellectuels . Ses parents ont refusé. Elle a eu, certaines années, une AVS.
    Ca lui fait une vie fatigante car son emploi du temps est chargé pour elle (suivi par un psychiatre le mercredi) et, justement, elle est fatigable du fait aussi qu'elle doit faire plus d'efforts que les autres pour s'adapter sans cesse . De plus elle souffre de ne pas être comme les autres jeunes de son âge . Mais à l'adolescence c'est un problème courant chez à peu près tous les jeunes, je crois.
    Mais quelle volonté! Cette nouvelle va l'encourager. Merci de nous en avoir fait part.
    Je félicite en mon for intérieur ce jeune et sa famille et me réjouis avec eux, avec vous.
    Thérèse.

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  6. Bonjour Thérèse,

    Oh oui, il en faut du courage de la persévérance et beaucoup de patience aussi aux jeunes autistes et à leurs parents pour se maintenir dans un système qui ne veut que des personnes moulées dans le même moule.

    Mais dans cette organisation de l'éducation, il y a de temps en temps des professionnels qui ont une certaine idée déontologique du métier d'enseignant qui place la relation de proximité professeur - élève très haut, plus
    haut qu''un certain verbiage sur un soi-disant socle de connaissances à faire ingurgiter.
    Ces professionnels-là ont une capacité d'écoute exceptionnelle sans chercher une quelconque gloire ou reconnaissance personnelle. Ils s'intéressent aux cas particuliers non standard par éthique personnelle.
    Elles estiment faire leur devoir au delà des circulaires, lettres de cadrages, impératifs de rentabilité budgétaire provenant de leur administrations ou autorités supérieures.

    La rencontre providentielle entre un enseignant qui fait confiance et le jeune en question a eu lieu.

    Je souhaite un succès équivalent pour la jeune fille, ses parents et la grand-mère.

    Bon week-end.

    Emylia

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  7. Oui, J'en connais de ces professeurs. C'est beau de voir leur joie quand leurs élèves sont en progrès et réussissent.
    Bonsoir.
    Thérèse.

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Emylia