dimanche 31 mai 2015

Le frat 2015

Il fut un temps où les institutions s’occupaient trop des jeunes. Elles cherchaient à les embrigader ou à les endoctriner contre leur propre intérêt. Puis est venu le temps de l’indifférence où les institutions n’avaient plus rien à dire à la jeunesse. Il n’y avait point de  progrès humain à promettre ni d’espérance d’un avenir meilleur à faire miroiter hormis un désir insatiable de consommation. La jeunesse était livrée comme consommateur au présent et au futur aux différentes formes de marketing agressif. Les enfants n’ont plus guère que leurs parents, parfois leurs enseignants et leurs copains comme interlocuteurs.
L’église elle même a quelques difficultés à s’adresser aux jeunes comme au reste de la population. Et pourtant je dois reconnaître que notre vieille église peut parfois avoir du géni. Ainsi en organisant le « Frat », les diocèses d’Ile de France arrivent à rassembler une dizaine de millier de jeunes, le temps d’un week-end de Pentecôte. Trois jours durant lesquels, les jeunes entonnent des champs religieux et assistent à des célébrations de messes et pratiquent des prières collectivement. Cette année, le frat regroupait des adolescents de 4ème et 3ème à Jambville.
Ces journées sont animées (depuis plusieurs années) par le groupe chrétien « Glorious » de musique électro-pop qui fait chanter à l’unisson des chants religieux, liturgiques, dans un délire d’enthousiasme et de joie, tous les jeunes avec les religieux et bénévoles qui les encadrent. Bien que cette musique ne constitue pas mon socle culturel de base, je trouve cette musique très envoutante, dynamisante et euphorisante. L’église a trouvé un canal idéal pour s’adresser à la jeunesse. Espérons aussi qu’elle sache aussi les écouter. Souhaitons aussi qu’elle sache écouter toutes les personnes qui ont besoin d’être entendues pour pouvoir vivre comme tout être humain qui besoin d’un peu d’attention. L’église peut jouer un rôle social essentiel très attendu dans la vie de nombreuses personnes. Saura-t’elle saisir de nouvelles potentialités de communication et d’échange avec les hommes et femmes du XXI siècle, de trouver de nouveau des paroles audibles et porteuses de ce qui manque et de nouveau mettre en œuvre la mission que lui a confié le christ, en missionnaire sur les terres chrétiennes ? 

Emylia


lundi 25 mai 2015

La divination de l’homme, c’est le cheminement vers soi

C’est toujours émouvant d’écouter le témoignage d’une personne qui m’a précédée sur le chemin d’humanité, surtout quand ses paroles renforcent le thème de nos échanges sur ce site. La découverte de ses mots tombe comme une révélation de Pentecôte. Cette lumière vacillante que j’essaye de suivre par intuition sans espoir a priori de confirmation attendue, se manifeste comme l’un des multiples chemins de vérité que beaucoup d’autres personnes ont emprunté bien avant moi et ce depuis la fondation du monde. Ces multiples chemins de vérité tendent et convergent vers un point inaccessible de notre vivant de chair, mais qui existe pourtant bien.
Oui, je n’avais pas porté attention à Annick de Souzenelle dont j’ai écouté hier l’émission du 15 février 2015 aux racines du ciel sur le « cheminement vers soi ». Cette émission complétait bien ses propos lors d’une précédente émission aux mêmes « racines du ciel » en 2013  sur le thème de « la vocation divine de l’homme ».

Le témoignage de Annick de Souzenelle me confirme que mon travail personnel de compréhension de la symbolique des saintes écritures que je réalise depuis le début de cette année, constitue bien une poursuite dans l’approfondissement de mon cheminement spirituel entamé depuis huit ans au moins, et non pas une vaine recherche extérieure de connaissance à faire valoir dans le monde.
Le constat unanime et désabusé de la situation notre monde nous conduit à un passage obligé par le constat de l’absurde impasse de vacuité, d’abysse de vide spirituel dans laquelle notre civilisation mondialisée nous a menés, alors qu’elle avait  semblé porter un projet de société libre, juste, équitable et fraternelle.
Heureusement, il y a d’ailleurs un phénomène peu connu mais réjouissant dans la mesure où nous sommes bien plus nombreux que nous le pensons, à chercher des portes de sortie de cette impasse pour prolonger l’aventure spirituelle humaine et surtout rester en vie spirituelle pour ne pas mourir bien avant notre mort physique comme des robots désincarnés.
Il ne faut pas croire non plus que le passé valait mieux que le présent, et que l’avenir sera pire que le présent. Oui nous somme bien plongés au cœur d’un retournement sans équivalent de civilisation dont les prémices en rongent peu à peu les fondements. La révélation de la vraie vie est la chose la plus secrète et la plus protégée (confisquée) du monde, seulement accessible qu’à une minorité éclairée.
Ce qui est sûr, c’est qu’il faut travailler à se transformer. Annick de Souzenelle parle de mutation. Je n’aime pas trop ce terme qui laisse à penser que l’on change par hasard et non par choix décisif personnel. La mutation de l’ADN dans une cellule mène au cancer, alors que le but de la vie de la chenille, c’est la métamorphose en papillon. Mais pour que la conversion se produise, il faut y travailler et non pas attendre comme cette personne « rigide » qui me disais « à moi, il ne m’est jamais rien arrivé », et pour cause, il faut se réchauffer le cœur avec l’amour.
Je suis d’accord, transposer les récits des saintes écritures en évolution de son intériorité ne va pas de soi. Il n’est pas donné à tout le monde d’apprendre l’hébreu et de déchiffrer les textes à la source, de les interpréter dans le contexte culturel de l’époque et de les rapporter à notre époque. C’est un travail titanesque pluri disciplinaire hors de portée de la plupart d’entre nous.
Mais comme toujours, il y a quelques rares personnes éclairées qui ont fait déjà le chemin et qui nous l’ont déjà balisé. À nous, reste seulement le travail d’attention, d’écoute, de veille et de vigilance. À nous découvrir nos propres racines célestes, le point de jonction et de rupture de nos eaux terrestres avec nos eaux divines. À nous de faire advenir nos trois baptêmes d’eau, de feu et du crâne, à percevoir selon les interprétations des écritures telles qu’elles nous ont été transmises par les pères de l’église et préservées dans leur signification originelle dans de nombreuses pratiques du christianisme oriental et peut être aussi dans d’autres spiritualités, bien qu’aucune religion ne puisse jamais se prévaloir de détenir à elle seule toute la vérité qui nous concerne.
Annick de Souzenelle est notre « Lytta Basset » à la française, en matière d’étude de la symbolique de la bible. Dans les deux cas le corps a une importance primordiale pour que l’esprit puisse faire son œuvre dans le cœur. Ce corps intègre aussi la raison qui nous fait vivre des moments de joie profonde comme de peines déchirantes. Les deux auteurs n’ont pas strictement la même expérience humaine, mais elles ont vécu toutes les deux un effondrement lors de leur enfance. Elles ont surmonté les épreuves de leur passé grâce à des rencontres avec des personnes exceptionnelles qui leur ont permis de développer cette intelligence des écritures qui les a sauvées à jamais, pour en sauver aussi des milliers d’autres anonymes, si seulement ils veulent bien y consentir.


Emylia

dimanche 17 mai 2015

Idolâtrie

Il y a quelques semaines, je relatais mon trouble ressenti face à un excès de messes et surtout une durée extrêmement longue de ces messes en soirée (presque trois heures), durant la période Pascale.
Je comprends bien qu’il faille commémorer, faire mémoire, anamnèse. Mais à partir de quel excès de cérémonies risque t’on de s’attacher plus à la célébration elle même, à son organisation, son déroulement, la perfection de son exécution plutôt qu’à l’événement religieux sous-jacent. Je sentais bien qu’il y avait un risque d’idolâtrie quand la forme en vient à masquer le fond.
Il y a aussi la question de la représentation religieuse, les images permises ou interdites sur le Christ ou même Dieu, avec la question évidente « comment peut-t’on tuer au nom d’images supposées être blasphématoires ? ». Si Dieu veut être aimé, il n’a cependant jamais demandé aux hommes de faire justice à sa place.
Aussi j’ai été très contente de pouvoir écouter aux « Racines du ciel »,  Jean-Yves Leloup, un religieux orthodoxe, sur ce sujet.
Et j’ai trouvé particulièrement pertinente la comparaison de deux comportements qui semblent a priori opposés, l’athéisme et la religiosité excessive, alors qu’ils dénotent une similarité dans leur rigidité commune qui ne sait pas percevoir l’invisible au delà du visible.
Les athées ont parfaitement raison de rejeter le comportement de certains croyants qui lui renvoient une image de Dieu dégradée qu’ils ne peuvent accepter. Les certains dévots s’attachent peut être un peu trop aux aspects matériels de la religion ou bien aux rituels en délaissant quelque peu l’élévation spirituelle de l’âme. Ce que Jean-Yves Leloup leurs reprocherait, c’est de trop s’attacher aux évidences visibles et de ne pas se donner la peine de rechercher l’invisible qui crève les yeux de sa présence au cœur du visible, de ne pas savoir dépasser les évidences pour aller subtilement plus loin.
Une autre idolâtrie évidente est celle de la raison. Je me suis souvent interrogée sur ce qui me poussait à lire de nombreux textes. Il ne me semble pas que j’idolâtre ni la forme ni le fond des textes, car ce qui m’importe, c’est de nourrir ma foi, effectivement d’être plus sensible à l’invisible au cœur du visible. Croire à l’absolu de la raison conduit à l’erreur et à la tyrannie. Le grand risque, c’est d’adhérer à des schémas de pensée automatique qui évite d’avoir à penser vraiment, c’est-à-dire d’adhérer de façon aveugle à des dogmes qui brident la liberté de l’homme de choisir selon son propre discernement. Ces dogmes risquent d’asservir bien plus qu’ils ne libèrent. Ils permettent de condamner automatiquement les contrevenants sans donner le droit aux accusés de leur défense, avec l’examen des cas particuliers des éventuelles circonstances atténuantes.
J’en conviens que ces injonctions à l’obéissance ne sont pas le propre des religions révélées et que notre société laïque est aussi fondée sur tout un ensemble d’idéologies et d’utopies irrationnelles, pour ne pas dire un catéchisme politico-économico-social convenu.
Actuellement, je suis en train de lire un livre sur la période de la naissance du christianisme.  Il est à peine croyable que des chrétiens aient pu s’affronter à mort sur des concepts sur la nature du Christ au cours de mémorables conciles et que ces réunions de conciliations aient dégénéré en condamnation pour hérésies. À cette époque la raison dogmatique et théoricienne en matière religieuse était adulée.
Aujourd’hui, c’est plutôt le manque de réflexion sur le sujet de la foi qui nous assaille. Paradoxalement, nous n’arrêtons pas de discuter de religion, essentiellement sur des thématiques seulement matérielles et temporelles.
L’idolâtrie est donc une cécité qui empêche de voir ce qui existe au delà des évidences, ce qui est présent dans le réel. L’idolâtrie est une autolimitation qui empêche d’éprouver pleinement cette expérience d’une vie capable de se transcender en découvrant la Foi dans le Christ, et donc de réaliser que tout ce chemin de vie n’est pas vain.


Emylia

dimanche 10 mai 2015

Commémoration de l’armistice

Voilà les soixante dix ans d’anniversaire de la fin de la plus meurtrière des guerres mondiales. Cette mémoire me paraît suffisamment importante, pour souhaiter que mon fils cadet de quatorze ans suive au moins l’un des bons reportages sur ce sujet. Je voudrais qu’il réalise que toute vie humaine a un prix inestimable. Parfois il est primordial de résister à la tyrannie, de refuser d’obéir à certaines injonctions de meurtres abominables, monstrueuses et inhumaines. Mon fils est plutôt gentil, généreux et solidaire. Mais il sort à peine des brumes de l’enfance et il savoure sa vie d’adolescence innocente, pour le moment assez préservée des violences extérieures. Pour lui, la guerre est un affrontement idéalisé entre le bien et le mal dans des contes pour enfants, dans lesquels s’illustrent des héros mythiques. Il sait bien que les relations humaines ne sont pas si faciles à établir. Les rapports avec les camarades de classe peuvent être tendus. Mais il suffit d’avoir au moins un très bon copain, pour qu’il perçoive bien que la période de l’adolescence est un moment de bonheur, capital et essentiel pour prendre dans quelques années un bon départ dans sa vie d’adulte.
Aussi, il ne tient pas du tout à l’intrusion de la bêtise, de la tristesse, de la férocité, dans son monde préservé. De mon côté, je ne voudrais pas qu’il soit totalement ignorant des différents aspects de la nature humaine, du meilleur comme du pire.
Comment peut-il recevoir ces amoncellements de corps décharnés de la shoah, les photos des camps d’extermination, la sauvagerie des combats sur des victimes civiles et militaires ?
Devant sa pureté de cœur, je voudrais presque m’excuser pour toutes ces vérités abominables. Ce d’autant plus, que les mêmes atrocités sont réalisées à l’heure actuelle à quelques heures d’avion, sans grand émoi et sans une forte mobilisation d’une indignation mondiale. Une mère ne met pas au monde un enfant pour qu’il voie et qu’il vive ces atrocités injustifiables. Je voudrais demander pardon au Christ, parce que son sacrifice n’a pas suffi pour arrêter la folie meurtrière des hommes.
Bien heureux les pacifiques, parce qu’ils seront appelés enfants de Dieu…
Ce soir je vais prier pour que le Seigneur donne la paix à mes enfants et qu’il leur donne la force d’être des artisans de la paix.
Je termine dans ma « bible de Lucile », la période des « Juges ». Voilà une période sombre de la bible qui fait suite aux conquêtes épiques, glorieuses et légendaires de Josué. Ce texte illustre parfaitement la faiblesse morale des humains qui n’ont de cesse que de se battre pour posséder quoi ? La terre bien entendu. La terre, bien plus précieuse que la vie ! Comme quoi, la sédentarisation apporte indissociablement la richesse et la guerre. J’y apprends que les Philistins, les légendaires adversaires de longue date des hébreux, ont donné leur nom à l’actuelle Palestine. Comme quoi, les conflits actuels ont leurs racines qui plongent dans des temps aussi reculés que les débuts de la bible, l’entrée des hébreux en terre promise, probablement vers 1200 avant Jésus Christ.
Je crois que la haine et la peur qui entretiennent les guerres, se nourrissent et se renouvellent dans l’ignorance et l’oubli des motifs initiaux des querelles. C’est bien pour cela qu’il est dangereux d’effacer les images et de détruire les témoignages, d’escamoter l’apprentissage de l’histoire.

Au lendemain de l’armistice le souvenir des atrocités de la guerre a permis d’imposer et de construire la paix en Europe. Pourtant certains témoignages de l’horreur qui n’ont pas été écoutés en temps utile. C’est peut être pour cette raison que nous n’avons pas su nous libérer de la barbarie.

Emylia

samedi 2 mai 2015

La femme de Job

Avec les quelques échanges que nous avons eu la semaine dernière et ce que je vis en ce moment, j’ai eu besoin de me replonger dans l’histoire de Job. Je n’ai pas eu ni le temps ni le courage de me replonger dans le livre de la bible, long de 42 chapitres. Alors j’ai lu sa synthèse et son commentaire dans la « Bible de Lucile » de Pierre Marie Beaude. Ce livre de Job tout comme celui de « l’Ecclésiaste » son classés parmi les  écrits de sagesse de la Bible. Il n’en demeure pas moins que leur interprétation et la conclusion que l’on pourrait en tirer est loin d’être évidente ou parfois confuse.
Le récit du « Livre de Job » est celle d’un riche juste, droit, très pieux et « craignant Dieu » qui a été largement comblé de dons par Dieu, qui un jour, sans raison compréhensible se retrouve privé de tous ses biens dans une succession d‘événements traumatisants. Dans les biens, on considère le bétail, les serviteurs, les enfants et aussi la santé. Ce sont les signes extérieurs apparents de réussite sociale de l’époque patriarcale. Étonnamment, la femme de Job ne semble pas être incluse dans la liste des biens. Elle n’a pas de nom contrairement à l’ensemble des protagonistes de l’histoire. Elle n’est donc pas une personne. Elle est en « off » ou en filigrane. Comme si elle n’existait pas, comme si l’histoire de son époux n’était pas aussi son histoire. Comme si elle n’était pas concernée par la perte de ses enfants.
Elle est pourtant dans l’histoire pour suggérer à Job de maudire Dieu, puis de mourir et c’est tout. Il n’est pas sûr qu’elle représente Satan qui incite Job à pécher. Peut être que personnage presque désincarné permet à Job d’affirmer qu’il accepte stoïquement la déchéance. S’il se refuse à blasphémer, il ne manque pas de maudire le jour de sa naissance et souhaite la mort. C’est étrange, mais chrétiennement parlant, il me semble que maudire sa naissance revient à blasphémer l’œuvre de Dieu.
Quand ses soi-disant amis viennent le voir pour partager sa peine, ces derniers essayent d’insinuer que pour subir un tel châtiment, Job a dû commettre quelques péchés. N’est-il pas de notoriété publique que Dieu punit les méchants et non les justes ?
Alors Job explose ! Non il n’a jamais offensé Dieu et il ne comprend pas cette avalanche de malheurs qui s’abattent sur lui. Il crie sa protestation ouvertement.
Ensuite, un petit jeune « arrogant », bien instruit en matière de religion, qui croit en savoir plus que tous les autres plus âgés que lui (donc pourtant forts d’une certaine expérience de la vie), se permet d’administrer à Job une leçon magistrale de morale affirmant que Dieu ne se trompe jamais et que par conséquent Job est bien prétentieux et qu’il ne peut que mériter son châtiment.
De nouveau, Job refuse d’endosser la moindre culpabilité et il s’accorde le droit d’affirmer son indignation, et son incompréhension quant aux causes premières de sa souffrance.
Dieu prend finalement la parole, non pas pour justifier la souffrance de Job, mais pour rappeler sa toute puissance, son rôle éminent dans la création et le fonctionnement du monde et de l’insignifiance de Job en comparaison de l’immensité et de l’importance du monde.
N’en déplaise aux doloristes, Dieu ne légitime pas la souffrance dans l’histoire de Job. Elle est tout simplement injustifiable. Dieu ne répond pas directement aux récriminations de Job. Il répond par un geste symbolique et énigmatique, en rétablissant sa santé et ses biens, lui donnant à nouveaux dix enfants, avec 140 années de vie en prime.
Donc la souffrance ne sert à rien. On peut retenir que les amis de Job et le jeune arrogant ont tort de soutenir que la culpabilité humaine viendrait expliquer à la raison humaine l’injustifiable. Cela met aussi du plomb dans l’aile du péché originel qui était bien pratique pour l’Église pour légitimer le malheur terrestre des hommes.
Il faudrait aussi retenir une phrase importante du jeune arrogant qui n’est en aucun cas une justification de la souffrance : « Dieu sauve le malheureux par son malheur, par sa détresse, il lui ouvre l’oreille ».
Donc il n’y a rien de bon à tirer de la souffrance, si ce n’est qu’une plus grande sensibilité et une ouverture du cœur vers autrui. Mais cette ouverture du cœur n’est pas toujours la conséquence du malheur. Ce dernier conduit très souvent au renfermement sur soi-même et la fermeture et l’endurcissement du cœur.
En tout cas, il est bien difficile de partager la souffrance de ses amis, a fortiori quand on n’a pas vécu une souffrance similaire. Les mots comme les théories théologiques ou autres discours convenus de circonstance sont impuissants à combler la détresse engendrée par le malheur. Probablement le silence et la présence sont la seule façon appropriée de respecter les personnes en peine.
On reste sur sa faim avec cette histoire de Job de la bible. On ne sait pas trop quoi en tirer. Alors Pierre-Marie Beaude dans le personnage de Lucile raconte une extension de ce récit d'après le livre de « la femme de Job » d’Andrée Chedid que je trouve particulièrement chrétienne.
Dans les histoires bibliques, les femmes sont souvent des personnages insignifiants qui font partie du décor. Elles ont rarement un rôle de premier plan comme dans toute société patriarcale. On ne s’intéresse  rarement à ce qu’elles disent ou ce qu’elles pensent, encore moins à leurs souffrances. On note pourtant leur présence à leur départ de la scène. La femme de Job a veillé en silence sur son époux bien aimé, tout au long de sa vie, en toute humilité, comme une servante. Un jour arrive au soir de sa vie, où c’est elle qui tombe gravement malade, d’une forte douleur dans la poitrine. Job se porte à son secours. Il lui déclare «  il n’y a pas d’explication ! toi, que mon cœur aime. Il n’y a pas de clé dans la souffrance !».
Mais si ! la clé était là : c’était l’amour que l’on découvre quand il s’en va ! Job se décentre enfin de lui-même et de ses malheurs pour découvrir enfin que l’amour était la clé des histoires de souffrance (je n’ai pas dis la solution). Il n’a plus le temps de creuser la question. Il est trop tard.

Emylia


Je n’ai pas encore lu le livre d’André Chedid, mais à la lecture des quelques extraits sur le web, je me suis empressée d’acheter une version d’occasion.