samedi 13 septembre 2014

Le monde imperméable à la grâce

« Il y a quelque chose de pire que d'avoir une mauvaise pensée. C'est d'avoir une pensée toute faite. Il y a quelque chose de pire que d'avoir une mauvaise âme et même de se faire une mauvaise âme. C'est d'avoir une âme toute faite. Il y a quelque chose de pire que d'avoir une âme même perverse. C'est d'avoir une âme habituée.

On a vu les jeux incroyables de la grâce pénétrer une mauvaise âme et même une âme perverse et on a vu sauver ce qui paraissait perdu. Mais on n'a pas vu mouiller ce qui était verni, on n a pas vu traverser ce qui était imperméable, on n'a pas vu tremper ce qui était habitué... Les "honnêtes gens" ne mouillent pas à la grâce. »

Ce n’est pas un de mes textes rédigés, mais un extrait de Charles Péguy que j’ai entendu à l’émission « Réplique » d’Alain Finkielkraut sur France Culture. Au début du XX siècle, cet écrivain pressentait que notre monde décrochait peut être définitivement de la religion, que l’humanité chrétienne passait entrainant dans sa fuite, l’humanité grecque qui avait précédé celle du Christ. Il n’y aurait plus l’homme, avec ses faiblesses et sa dignité d’être humain. Il n’y aurait plus non-plus d’homme se mettant au service de son prochain, encore moins au service du Christ ou de Dieu.
Charles Péguy n’avait pas tellement tort. L’homme contemporain n’est plus l’héritier de tout ce passé de civilisations plurimillénaires. L’homme contemporain s’est asservi aux idéologies de toute nature, à la technique et au consumérisme. Il renonce à sa liberté et à sa responsabilité, pour vivre en automate. Comme s’il avait le choix de refuser les dons divins. L’homme contemporain n’a que faire de la vie et de la mort. Il en est devenu indifférent, parce qu’il bourre son temps à s’occuper de mille choses, à se disperser sur un tas d’activités qui lui évitent d’avoir à penser à l’essentiel de ce qui le concerne personnellement. Pourquoi devrait-il solliciter la grâce divine alors qu’il peut si facilement se fabriquer lui même ses propres ersatz de bonheur. L’homme est devenu totalement imperméable à la grâce, devenue elle même totalement obsolète, même à en ignorer sa possibilité.
Bien sûr, dans le passé, le nombre de croyants officiellement déclaré était impressionnant. De nos jours, le nombre de pratiquants chrétiens est très limité. Et encore parmi eux se trouvent « un petit nombre de moralisateurs "un peu trop vernis, qui ne mouillent pas à la grâce".
Mais il me semble que la grâce existe encore de nos jours, et qu’elle ne dépend pas de nous pour se manifester. Cette vraie grâce là, ne s’exhibe pas médiatiquement. Mais pour qui est un peu attentif, il peut la découvrir sous de multiples formes d’expression très différentes.
Les conversions spontanées ou longuement réfléchies se produisent continuellement chez des personnes de toute condition ou de tout âge. Parmi les convertis, un certain nombre de personnes ignoraient culturellement le Christ. Cela ne les a pas empêché de le rencontrer (par inadvertance ?). J’en veux pour preuve les nombreux témoignages de foi qui abondent dans la littérature contemporaine.
Je ne crains pas que le christianisme se dissolve complètement dans notre modernité. Car aucune structure purement humaine ne peut contrôler sa diffusion. L’homme n’est pas le seul intervenant dans cette affaire de connaissance de Dieu. Quant-bien même le nombre de pratiquants serait de plus en plus réduit, une expression religieuse très discrète peut être le signe d’une foi très profonde et de qualité que ne peut révéler aucune étude statistique.
Cependant, comme dans le passé, une foi vive peut se perdre (et je pense à l’exemple de la petite Sainte Thérèse de l’enfant Jésus). Il me semble que cette expérience de la nuit de foi est une épreuve à surmonter (et non pas la fin de la foi). Je m’intéresse à ce phénomène en ce moment. Est-ce inévitable, ou y a t’il un moyen de résister ? Je suis en train de lire le livre « Le royaume » d’Emmanuel Carrère. Je n’en suis qu’au début. Comme lui, j’ai connu une émergence rapide de la foi. Comme lui, j’ai eu besoin d’écrire ma foi, de la travailler et de la vivre avec des mots. Comme lui, j’ai eu besoin de comprendre la foi des premiers disciples du premier siècle, ceux qui ont été au plus proche de cet événement exceptionnel et surnaturel de la résurrection. J’espère comprendre les mécanismes de la perte de foi : un excès de foi, un abus de grâce peut-il conduire à la perte de la foi ? Qu’est ce qu’un excès de foi ?

Ce samedi 11 septembre, Alain Finkielkraut donne la parole à d’Emmanuel Carrère( émission "Réplique" à 9H00). J’espère mieux comprendre.

Emylia

14 commentaires:

  1. Bonjour Emylia toutes et tous ,

    Je suis très heureuse de vous retrouver .
    Avant d'avoir lu votre billet d'aujourd'hui, Emylia, (je n'ai pas encore pris connaissance des précédents que j'ai ratés faute d'une connection où je me trouvais ), je pensais justement à cette émission de ce matin avec Emmanuel Carrère. Je l'ai écoutée aussi. Je ne suis pas étonnée que vous la signaliez, je m'y attendais même pour tout dire.
    Emission très intéressante. Par moments, j'imaginais les réponses que j'aurais faites à A. Finkielkraut . Elles n'auraient pas toujours été tout à fait les mêmes que celles de Carrère. Normal sans doute...En tout cas, ce genre d'événement littéraire réveille nos âmes habituées et permet de parler de l'Evangile dans des milieux où il est peu -ou pas du tout- connu et ne fait que rarement le sujet dont tout le monde parle. Je m'en réjouis; J'ai aimé aussi les phrases de conclusion de l'écrivain ...très ouvertes .

    A bientôt sans doute...
    Thérèse.

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  2. Je me corrige un peu tout de suite:
    . J'aurais dû écrire :"... ce genre d'événement littéraire...permet d'évoquer l'Evangile dans des milieux où il est rarement le sujet
    dont parlent en ce moment tous les médias.
    Car je ne sais pas encore s'il est un sujet de conversation privilégié. J'ai peut-être pris mes désirs pour des réalités. L'avenir nous le dira.
    Thérèse.

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  3. Bonjour Mamou,
    je suis parfaitement d'accord , en tous points, avec votre commentaire à propos du billet "Le cadet". Il m'a fait du bien.
    Thérèse.

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  4. Bonjour ou bonsoir à tous,

    Je suis contente de vous retrouver.
    Thérèse, j'espère que vous allez mieux qu'au début de l'été.
    Recommençons ensemble nos réflexions sur notre foi.

    Je dois dire que je suis ravie que l'un des événements de la rentrée littéraire traite de la foi et de la croyance
    dans la vie réelle.
    J'ai déjà progressé dans la lecture du "Royaume" depuis l'écriture de mon article.
    Et je dois dire que pour le moment ce livre comble mes attentes.

    L'auteur y raconte sa conversion inattendue et ses débuts de foi très vive et très "catho".
    Nous partageons ensemble ce profond désir de revenir au sources, dans la peau des premiers chrétiens qui ont cru ou voulu croire à la véracité de la résurrection.

    Mais vouloir appliquer l'évangile dans sa vie quotidienne apporte inéluctablement des problèmes.
    Certains déboires de l'auteur me font penser à ceux de Thierry B.
    Alors on ne peut pas échapper à relativiser l'esprit des évangiles (oui, mais ...) dans les applications concrètes.
    Vivre et pratiquer sa foi n'est pa si facile.

    En rapport avec mon article précédent je vais faire tout mon maximum pour protéger le petit cadet pour qu'il puisse apporter le bonheur à beaucoup de personnes.

    À bientôt.

    Emylia

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    1. Vous avez raison, Emylia. Que votre cadet reste le plus longtemps possible cet être lumineux. Qu'il apporte aussi à l'âge adulte du bonheur autour de lui. C'est un très beau programme. Je pense qu'une enfance heureuse laisse son emprunte bienfaisante et est un excellent départ dans la vie.

      J'ai très envie de lire " Le Royaume" d'E. Carrère depuis que je connais son existence. Je ne l'ai pas encore entre les mains. Si je ne le trouve à la médiathèque, je me l'offrirai, mais mon budget " livres" commence à peser. Je pense à m'abonner à la médiathèque de la ville voisine, mieux achalandée que celle de notre village.. (.que je fréquenterai aussi pour la soutenir): autre budget...

      "Vivre et pratiquer sa foi n'est pas si facile" écrivez vous. Réflexion que je me faisais aussi ces derniers jours. J'étais dans un "désert spirituel" (en tout cas apparemment, car savons nous ce qui se passe dans les cœurs?).J'ai mesuré combien ce blog m'aide à soutenir ma foi.

      J'ai aussi lu, relu et rerelu le livre de Zundel :"Au miroir de l'Evangile" que nous nous étions donné comme "devoir de vacances". J'y découvre toujours quelque chose de nouveau sous les mots, mais cela ne me parait pas très facile d'en rendre compte. C'est un travail intérieur en moi, du moins je l'espère. Maurice Bellet conseille assez souvent de changer de religion. Je crois que la lecture de Zundel m'amène à cela peu à peu. Je réussirai peut-être un jour à dire en quoi, mais il faut que "ça se décante" avant, je crois.
      Qu'en avez vous pensé, Nainai ? Je serais contente de le savoir. Cela m'aiderait sûrement à savoir comment, en parler.
      Bon après-midi à chacun(e).
      Thérèse.

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    2. Dans un de vos récents articles, Emylia, vous abordez le sujet du cancer. Je n'oublie pas que vous revivez plus ou moins ce combat à travers votre sœur. Je pense à elle, je pense à vous.
      Thérèse.

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  5. Bonsoir tout le monde,
    Très heureuse de vous retrouver, bien que je ne fus jamais vraiment absente et que je lis toujours les excellents billets d'Emylia. Hélas, telle une mauvaise élève, je n'ai pas fait mes devoir de vacances, en fait je n'ai pas lu le livre de Maurice Zundel, par paresse, manque de temps, fatigue. En effet, il y a eu chez nous un défilé d'amis qui vivent loin de nous et qui nous ont rendu visite tour à tour, et pour faire court, nous avons entamé de gros travaux dans nôtre maison. Ces travaux prévus pour le mois de Mars dernier et que nous avons reportés à ce mois ci, mon cher Mari, ayant chûté d'un arbre et s'était cassé la jambe. Nous avons la grande chance de pouvoir réaliser ces travaux, en prevision de nos vieux jours et entre deux séjours chez nos chers enfants, qui nous manquent terriblement.
    Cela étant dit, je pense très souvent à vous. Je n'ai pas trop le temps de poster des commentaires, mais sachez que j'apprécie de vous lire toutes et tous.
    Sans être orgueilleuse, j'essaye de donner de mons temps à des persones de mon entourage (voisins, vieux amis, amis) qui sont en difficulté sur le plan physique et affectif.
    Samedi, j'ai tout de même trouvé le temps de faire le pélerinage de ma ville jusque au sanctuaire de Nôtre Dame, en l'honneur de la Vierge Marie. Mon Mari, pas du tout pratiquant, a souhaité m'accompagner, lui qui a des difficultés à la longue marche, j'étais très émue. Tout m'est apparu superbe.
    Il est vrai, qu'il est très difficile de parler de sa Foi avec quiconque. Si je poste un petit commentaire ce soir, c'est aussi pour dire combien ma Foi aussi fragile qu'un souffle. Je n'avance plus guère !!! mais cet après midi, une amie m'a tétéphoné et je lui ai un peu parlé de mes difficultés, elle m'a dit cette phrase : "On n'est pas oblige de tout savoir ni détout comprendre". Cela m'a fait un bien fou.
    Samedi j'ai acheté au sanctuaire le livre du Père Zanotti-Sorkine "Au diable la tiédeur". Je vais tenter de m'y plonger en mettant un peu de côté mes lectures d'auteurs contemporains et qui me permette de m'évader et me faire rêver, me distraire et réfléchir aussi. J'attends avec impatience la fin des travaux, de retrouver le calme de notre maison pour lire le livre de M.Zundel. Bien qu'il semble vous avoir posé question, chère Thérèse.
    C'était donc pour moi un petit tour dans le blog d'Emylia et déjâ, comme toujours hors sujet.
    Je vous lis ... je ne cesse de vous lire ..... je vous apprécie beaucoup, je pense et prie pour vous.
    Un dernier mot j'espère Thérèse que votre santés s'améliore et que la soeur d'Emylia se bat avec courage contre son cancer entourée de l'affection des siens.
    Le billet "Dire et se Taire" a suscite une réaction : faire comme le coeur vous en dit, avec sincérité et amour de son prochain. C'était un don de vous même Emylia, une offrande.
    Amitiés
    Nainai

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  6. Bonsoir à tous,

    Je vous remercie de l'attention que vous portez à ma sœur. Le médecin a déclaré qu'elle pouvait attendre encore quelques mois avant l'ablation de son organe afin qu'elle puisse déménager en fin d'année.
    J'espère que le médecin ne s'est pas trompé.

    En vivant en femme seule qui a élevé son fils, ma sœur a montré beaucoup de courage. Elle semble solide, pragmatique et réaliste.
    Avec le temps qui s'écoule, je ne peux qu'admirer son attitude forte face aux épreuves.
    Nous n'avons pas le même tempérament. Mais qu'importe, la vie qui nous avait un peu éloigné nous rapproche désormais.

    Cependant je suis comme vous Thérèse ou Nainai. Je ne peux pas évoquer la foi ouvertement parce que je sens bien que je ne serais pas comprise, moi la rationnelle de la famille. Ce n'est pas le moment d'aborder ce sujet.

    Je dois avouer que je ne me suis pas procurée le livre de M. Zundel car je voulais absolument terminer des livres comme ceux de Lytta Basset, puis Emmanuel Carrere (ainsi que Thomas Picketty). Mais ce serait un très grand plaisir de lire l'expression de votre foi à la lumière de l'oeuvre de ce saint homme.

    Je vous souhaite une très bonne soirée.

    Emylia

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    1. Bonjour à vous,

      Ne vous inquiétez pas Nainai et Emylia parce que vous n'avez pas lu le livre de M. Zundel. Je ne suis pas le professeur qui ramasse les devoirs à la date prévue ou qui donne des interrogations pour vérifier que le travail a été fait. Ce n'est pas grave, Chacun(e) va où l'Esprit (ou les circonstances) le mènent.

      Si je parle tant de cet auteur, c'est parce qu'il me conduit vraiment, peu à peu, à une autre conception de "la religion".( Je mets des guillemets car je n'aime pas tellement ce mot ). Il m'amène à croire d'une autre façon. En passant d'un Dieu extérieur à un Dieu intérieur, il me semble que ça change tout. J'en avais besoin.
      Dimanche soir, nous étions à une messe en dehors de notre paroisse, mon mari et moi. ( Comme le vôtre, Nainai, le mien m'accompagnait alors qu'il ne pratique pas, c'est un beau geste de respect et de sollicitude de leur part ). L'homélie était très " Zundelienne" et m'a libérée à propos de blocages qui me restaient à la suite d'une image que je gardais encore tellement elle est enracinée, d'un Dieu dominateur , juge, extérieur tel qu'il nous a été si souvent présenté. Il parlait du sentiment de culpabilité (à ne pas confondre avec la vraie culpabilité ). Il disait que notre vrai péché, le plus souvent, est de ne pas croire en sa miséricorde. Miséricorde qui est pourtant infinie. Il s'est beaucoup attardé là-dessus, de belle façon.
      Je suis sortie de la messe avec une joie nouvelle et une plus grande confiance en Dieu...et en moi.

      Ce que je voulais dire à propos de ma difficulté à parler du livre "au miroir de l'Evangile", c'est qu'au fond, il n'est pas à lire de façon vraiment intellectuelle . Je crois qu'il est à lire avec le cœur. Un peu comme on lit un poème, en s'attardant, en laissant résonner un mot , une phrase...Ils se mettent à vivre, à parler et nous "ouvre à l'intelligence des Ecritures". J'en suis arrivée à parfois ouvrir une page au hasard , de lire un paragraphe et de le laisser faire son chemin dans ma tête ou plutôt dans mon cœur. Les vieux schémas ont la vie dure, mais la tête aussi travaille car il faut réfléchir pour changer de perspective. Je trouve que certaines affirmations sont " renversantes."
      Ce n'était donc peut-être pas une bonne idée de vous proposer qu'on en discute. M. Zundel dirait sans doute que c'est avant tout à vivre et c'est déjà commencé pour vous, chez les voisines, chez votre sœur etc..

      A bientôt, car je voulais parler de la nuit de la foi, et je ne l'ai pas fait.
      Bon courage pour les travaux, Nainai. Je vais me commander "Le Royaume" Emylia.
      Bonne journée.
      Thérèse

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  7. Quand j'écris que c'est déjà commencé pour vous, je ne veux pas insinuer que vous êtes des débutantes dans la pratique du soutien aux autres, bien sûr... Je m'exprimais mal. Bonne journée.
    Thérèse.

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  8. Bonjour Thérèse,

    Ne vous inquiétez pas, nous savons que vous n'insinuez absolument pas de propos blessants. Je crois que la nuit de la foi nous concerne tous.
    Je crois qu'Emmanuel Carrere s'interroge là dessus. J'ai lu le début de son livre qui évoque l'émergence de sa foi vive, sur une courte période de 3 ans. Je viens juste d'arriver à SaintPaul. Je ne sais pas si le livre va se poursuivre uniquement en enquête historique.
    L'auteur croit avoir perdu la foi. Mais il doit probablement s'interroger sur ce qui le pousse à écrire ce gros livre sur le Royaume, 20 après sa foi.
    Je ne sais pas si je vais comprendre ce qui lui est arrivé. Ensuite je pense relire le livre de Maurice Bellet sur la petite Sainte Thérèse de l'enfant Jésus car je n'ai pas bien compris le côté extraordinaire de sa perte de foi, suivi de son abandon total.
    Si Maurice Bellet admire la petite Thérèse, si l'église de Rome s'est empressé de la canoniser aux côtés des plus grands penseurs spirituels de tous les temps, il doit y avoir quelque chose d'extraordinaire chez la petite Thérèse que je ne saisis pas bien. Tandis que les autres prennent le long escalier tortueux spirituel, la petite Thérèse, elle prend l'ascenseur spirituel. Qu'est ce que cela peut bien vouloir dire. Je crois qu'il y a un extrait du texte sur le blog de Maurice Bellet.

    Bonne journée à vous toutes et tous.

    Emylia


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  9. C'est justement Ste Thérèse de l'Enfant Jésus que je voulais évoquer. Cela m'a fait un drôle d'effet de lire, dans votre article, à son propos "perte de la foi" . Je vais essayer de m'expliquer et de vous dire comment je crois comprendre ce qui lui est arrivé.

    Vous dites très bien que c'est une épreuve à surmonter et non la perte de la foi. C'est tout à fait ça. Pour Ste Thérèse, l'épreuve a duré longtemps et a été très douloureuse. Je pense qu'il ne faut pas confondre le sentiment de la foi et la foi, la perte de ce sentiment et la perte de la foi. Thérèse n'a pas confondu les deux choses.
    Pour reprendre un vocabulaire religieux moins utilisé de nos jours, nous traversons des moments de consolation et des moments de désolation dans notre vie spirituelle. Ce moment de désolation est un moment où nous pouvons être lassés d'entendre parler de Dieu, il nous devient indifférent, ou bien nous nous sentons si indignes de lui que nous nous décourageons et sommes tentés de laisser tomber la prière ou toute pratique religieuse en nous disant que nous n'y arriverons jamais, que ce n'est pas la peine d'insister.

    Je ne sais ce que se disait Ste Thérèse, mais malgré sa souffrance, elle ne se décourageait pas et continuait de tout faire comme avant. Elle tenait dans l'épreuve. Une chose m'a frappée: M. Bellet cite souvent sa phrase où elle explique dans quel état d'esprit elle est : " je n'en dis pas plus, je craindrais de blasphèmer" .( Je cite de mémoire, j'ai peut-être un peu changé le début de la phrase ) ; Si Thérèse avait vraiment perdu la foi, il n'y aurait plus de Dieu à offenser pour elle. Je pense que si elle craint le blasphème, c'est qu'elle croit, non?

    Son épreuve ressemble à une tentation qui dure dans le temps, qu'elle affronte avec courage,( elle qui disait avoir une vocation de martyre, elle l'accomplit là) Grâce à ce qu'elle a vécu et au fait que nous en ayons eu connaissance, nous pouvons nous appuyer sur elle et sur son expérience de nos jours où la tentation de l'incroyance est si forte et si répandue.

    Mère Térésa de Calcutta, qui avait beaucoup d'admiration pour la sainte de Lisieux, a vécu cet état pendant 50 ans! Elle ne l'avait dit qu'à trois personnes de son vivant. Qui l'aurait cru à ce moment là ! Nous avions l'habitude de son grand sourire et nous connaissions son travail immense. Elle continuait tout aussi comme si tout avait été évident pour elle. Elle disait à ses confidents qu'elle ne voulait pas le dire à ses sœurs car elle ne voulait pas les entraîner dans ses ténèbres! Quelle douleur cela suppose! Elle qui parlait si bien de la joie dans le même temps !

    Je lis souvent que le contraire de la foi, n'est pas le doute mais la peur. Ces deux saintes sont restées fidèles dans leurs doutes. C'est en cela qu'elles ont eu la foi. St Jean de la Croix aussi est passé par là Aussi. Ce n'est pas sur leurs sentiments, leur propre force qu'ils ont compté, mais sur le secours de Dieu, même s'il leur paraissait absent. Je pense qu'ils s'abandonnaient à dieu à c e - m o m e n t - là, en même temps, se sentant trop faibles par eux-mêmes pour tenir. Les Saints sont très humbles .

    Je ne sais si c'est ainsi que M. Bellet voit le problème. c'est ainsi que je le comprends ou crois le comprendre.
    Bonsoir
    Thérèse.

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  10. Je crois que M. Bellet pense -et je le pense aussi- que le combat spirituel de Thérèse de Lisieux a dû être terrible et pouvait peut-être se rapprocher des tentations des Pères du désert. C'est sans doute ce qu'il veut souligner quand il en parle dans ses livres. ...Et peut-être aussi l'idée que si ça arrive aux plus grands spirituels (Docteur de l'Eglise) il ne faut pas s'étonner que cela puisse nous arriver aussi ?. Nous n'avons pas à déserter pour autant et dire non à la vie chrétienne mais à tenir dans l'adversité...avec l'aide de Dieu puisque Lui reste bien là, en nous et avec l'exemple de ces saints.
    Dieu ne permet pas que nous soyons éprouvés au delà de nos forces. Pour les saints que j'évoquais, il y avait cette certitude paradoxale puisqu'en même temps, ils doutaient de son existence (Th. de Lisieux en tout cas, pour les autres je ne sais pas ce qu'ils ressentaient ) Je pense que pour tenir, ils avaient aussi le souvenir des grandes grâces qu'ils avaient reçues autrefois et de grands moments forts sur lesquels ils avaient bâti leur foi.
    Thérèse

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  11. Bonsoir Thérèse,

    Vous expliquez très bien la différence entre la perte de foi et le sentiment de la perte de la foi. Le sentiment de la perte de foi est d'ailleurs bien plus explicite avec le terme de nuit de la foi.
    Dans la nuit, nous sommes aveugles et nous ne savons pas quelle direction prendre. On tâtonne, on cherche, on essaye. Mais on n'abandonne pas. Et on n'est pas indifférent non plus.

    Peut-t'on dire que la perte de la foi est une apostasie ?

    Je pense que c'est différent. Car j'imagine qu'apostasier conduit à condamner sa propre croyance antérieure comme une naive crédulité.

    Vous dites une chose très importante : on garde la mémoire qu'il s'est passé qu'à un certain moment critique, il s'est passé quelque-chose d'inattendu, presque de sur-naturel.

    Tant que la mémoire de ce moment est préservée et reconnue sans déni, alors on est dans le sentiment de perte de la foi ou nuit de la foi.

    Le Christ a t'il vécu ce sentiment de perte de foi lorsqu'il dit "Mon Dieu, pourquoi m'avez vous abandonné ?"

    Cette tentation là du sentiment de la perte de la foi doit être en plus associée à une désespérance. Il en faut de la volonté et du courage pour contrer cet état, au delà des apparences du néant.

    Bonne nuit.

    Emylia


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