jeudi 17 octobre 2013

Métier : Semeur d’espoir


J’aime beaucoup la phrase d’un philosophe contemporain : «philosopher, c’est penser sa vie et vivre sa pensée. » 
En la transposant à la vie chrétienne cela pourrait donner :
« Être chrétien, c’est penser ou prier sa vie et vivre sa vie en pensées et en prières, en harmonie avec l’esprit des évangiles. »

Cependant, ne serait-ce pas un idéal utopique ? Pour le réaliser, ne faudrait-il pas se retirer du monde pour échapper à ses pièges pour s’enfermer dans un couvent : s’extraire du monde afin de prier pour le monde. N’est-ce pas un défit redoutable que de rester au cœur du monde et de résister de toutes ses forces contre vents et marées.

Aujourd’hui, j’ai une pensée pour les exclus de ce monde, pas seulement les exclus dont on parle toujours et pour lesquels on éprouve de la compassion.
Non, je voudrais évoquer les exclus minoritaires dont on ne parle jamais car on ne leur accorde même pas ce statut. Ils seraient plutôt considérés comme des « exclus privilégiés ».

Ils ont fait de longues études. Ils sont bardés de diplômes et hyper-qualifiés. Ils rêvent de faire de la recherche fondamentale, pure et désintéressée (de tout enjeu financier). Dieu dans la Genèse, n’a t’il pas invité l’homme à découvrir les merveilles de la nature ? Voilà une noble ambition pour l’être humain.

Pourtant, au terme de leurs études, le système pose toutes les restrictions inimaginables pour les empêcher de faire une thèse. Ou s’ils ont une thèse, on les précarise en PostDocs, éventuellement renouvelés d’année en année, en fonction des moyens disponibles, pour finalement les rejeter du système par une loi de non cumul des CDD. Une nouvelle classe d’esclaves diplômés des temps modernes fait son apparition (pas uniquement en France).

Voilà comment dans notre beau pays de liberté, égalité et fraternité, nous brisons les rêves d’une jeunesse méritante et travailleuse par des mécanismes malthusiens et précarisants.
Pour une personne comme moi, qui a fini par arriver aux responsabilités de faire vivre un petit groupe de recherche, comment ne pas se rendre complice d’un système aussi brutal ? Comment résister pour y mettre un peu d’humanité ?

Faut-il refuser de se compromettre, claquer la porte et aller voir ailleurs ? La bonne attitude ne serait-elle pas au contraire de résister, de freiner le système, de réagir et si possible de chercher des astuces pour le contourner ?

Il faut en permanence lutter pour ouvrir de nouvelles perspectives, quémander des moyens (je ne supporte plus ce mot « moyens » pour désigner des êtres humains), pour créer des emplois très temporaires pour finalement se séparer dans le déchirement de collègues très méritants et devenus indispensables. Il faut  inlassablement créer de nouveaux projets, se projeter dans l’avenir pour semer de nouveaux espoirs.

Être chrétien, c’est implorer les lumières de l’Esprit saint quand il y a des problèmes à résoudre, des solutions à trouver, des choix à faire, des demandes de moyens à soumettre sans relâche.
Être chrétien, c’est tenter de pallier à l’inhumanité du monde pour tenter réparer ses failles abyssales en fabriquant au jour le jour, l’espérance d’un lendemain ou tout rêve de connaissance devient possible.

1 commentaire:

  1. merci Emylia. j'ajouterai simplement ceci : il faut de tout pour faire un monde. Y'en a qui sont taillés pour vivre dans le monde et lutter dans le monde pour trouver des solutions aux problèmes du monde; tandis que d'autres sont taillés pour vivre hors du monde - ce qui ne les empêchent guère de lutter à leur manière pour aider à trouver des solutions aux problèmes du monde - par le moyen de la prière par exemple. Dieu entend toute prière désintéressée... Je suis pour le retrait du monde actuel car oui, c'est un grand défi que d'y rester et de résister - je l'avoue je ne suis pas taillée pour ça... alors je fais ce que je peux pour ce monde - je compte sur La Providence et sur La Grâce de Son Créateur.

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Emylia