mardi 8 octobre 2013

Les chariots de l'espoir


Vincennes, le dimanche 6 octobre 2013

Ce dimanche matin là, exceptionnellement, je m’étais levée très tôt. J’avais à accomplir un rite annuel auquel je n’ai pratiquement jamais dérogé en cinq ans en dehors d’une circonstance exceptionnelle. Déjà à la station Chatelet, quelques tee-shirts roses sporadiques se révélaient dans une déjà foule dense pour une heure si matinale. Une émotion me serra la gorge lorsqu’à la station Vincennes, une marée de tee-shirts roses déferla à la sortie du RER. Il y avait beaucoup de jeunes gens mais aussi des moins jeunes comme moi, quelques uns venus avec des amis ou des collègues, mais la majorité était venue individuellement. Quel était donc le motif de tous ces gens pour tant d’effort matinal, le même que le mien ? À l’esplanade du château, une foule en rose immense et indénombrable galvanisée par une sono très enthousiaste s’agitait et se préparait au grand départ de la course du 10 km chronométrée de l’Odysséa dans une ambiance survoltée et joyeuse. Quel était l’enjeu de cette immense mobilisation collective ? Ces dix mille personnes communiaient en une même espérance unanime, que le désir de vie surmonte la maladie mortelle grâce à l’intelligence humaine et à la solidarité fraternelle. Après le départ, cette belle communion fraternelle se dissipa peu à peu pour faire place à la solitude individuelle face à l’effort personnel exigé par la course. Chacun d’entre nous entre en lui-même en se trouvant confronté à ses propres limites physiologiques et à ses ressources mentales.
Le flux ininterrompu des coureurs plus rapides que moi m’entraine d’abord dans un rythme qui n’est pas le mien. Je sais bien que mes propres ressources sont limitées et que je risque de décrocher rapidement. Je sens poindre le risque imminent du point de côté. Alors je pense à Jésus qui a souffert sans comparaison possible avec ma propre situation. Je lui demande la grâce de m'accorder de poursuivre ma route, de tenir à tout prix jusqu’à l’arrivée. Ce prix c’est le courage nécessaire pour les malades de tenir face à la maladie, en dépit des soins médicaux qui aggravent l’état physique apparent du corps, en dépit des pronostics alarmants et le prix pour croire que le miracle est possible. Je ralentis, j’inspire de grandes bouffées d’air. Les jambes semblent tenir le coup sans douleur particulière, le cœur ne s’emballe pas et la respiration se stabilise. Je m’émerveille devant la capacité d’endurance du corps humain. À deux kilomètres de l’arrivée, je commence à ressentir sérieusement l’épuisement. Pourtant je ne ressens aucune douleur. J’éprouve un désir impérieux de m’arrêter pour marcher. Je ne dois pas obéir à ce désir. Il faut penser à tous les malades de toutes les maladies qui eux ne peuvent pas s’arrêter pour reprendre leur souffle. Nous devons tous poursuivre notre route tant que nous le pouvons, tant qu’un élan de vie nous habite. Ce parcours n’en finit pas. Il tournicote dans tous les sens. Quand je parviens à entendre le vacarme de la sono, c’est le signe que la délivrance est proche. Finalement, j’aperçois enfin le porche de l’arrivée et je sais que je vais finir la course.
À l’arrivée, il n’y a pas de joie excessive, seulement la satisfaction mesurée d’avoir accompli l’engagement annuel de se dépasser au delà de la routine ordinaire, grâce à Dieu. Ce qui compte, ce n’est pas seulement la participation financière indispensable pour la recherche. C’est encore moins l’extase devant le chronomètre ou le classement. C’est avant tout le symbole porté ce jour là par les 30000 participants aux manifestations sportives d’Odysséa, pour qu’une société n’oublie jamais ni ne sacrifie des centaines de milliers de vies de malades à l’autel de l’économie financière triomphante. Le vrai Dieu, c’est celui impulse l’élan de la vie.

3 commentaires:

  1. C'est un beau symbole cette course. Je savais que le mois d'octobre était dédié à la prévention et à la lutte contre le cancer du sein, mais j'ignorais cette manifestation-là.
    Symbole comme vous le dites bien des malades qui n'ont pas la possibilité de se poser pour souffler un peu avant de repartir, et qui doivent aller puiser aux tréfonds d'eux-mêmes une énergie qu'ils ne pensaient même pas posséder... Preuve aussi que l'homme peutr laisser parler ce qu'il a de bon en lui, et se mobiliser de manière altruiste. Cet élan redonne effectivement confiance en l'homme, et confiance en Dieu.
    J'ai lu dans plusieurs publications récentes des extrait d'un livre de Mathieu RICARD, converti au boudhisme, qui affirme que contrairement aux idées reçues l'homme est fondamentalement bon et altruiste. Il se base sur le fait que faire le bien, aider son prochain, sourire à un inconnu rend plus heureux. Cette course à laquelle vous avez participé, Emylia, en est le reflet. Pas de triomphalisme pour l'effort physique fourni, mais la joie de l'avoir fait, avec tant d'autres.
    Pour partir d'un autre exemple concret ("ordinaire", comme j'aime à le faire, une de mes filles ado a été amenée, dans le cadre d'un weekend pour la préparation de sa confirmation, à rencontrer des religieuses très agées, en fauteuil roulant pour la plupart. Les jeunes devaient les prendre en charge sur un après-midi, faire connassance, les promener, les accompagner, les écouter. Vous n'imaginez pas le bonheur que tous ces jeunes (et les soeurs) ont éprouvé de cet échange, alors qu'au départ l'idée les mettait plutôt mal à l'aise. Ma fille rayonnait quand elle m'a raconté ce moment, et pourtant c'est une ado bien dans son époque, qui pense plus à sa tenue ou à sa coiffure a priori qu'à promenr une vieille dame inconnue! Là-aussi, j'en suis sûre, dans ces petits détails-là, Dieu se manifeste et l'Esprit Saint a imprégné scs rencontres extra-"ordinaires"...
    Continuons à mettre de l'extra-ordinaire dans nos vies ordinaires!

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    1. Bonjour Laurence,

      J'aime beaucoup Matthieu Ricard. J'ai lu plusieurs de ses livres avant de découvrir le Christ. En particulier "Plaidoyer pour le bonheur" a été pour moi une révélation qui m'a menée à Jésus. Quoi qu'il en dise ou en pense, il y a de l'esprit saint en lui.

      Emylia

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  2. "Continuons à mettre de l'extra-ordinaire dans nos vies ordinaires!"

    Hier matin chez le dentiste – qui décide de me faire un détartrage.

    Déjà crispée, je me crispe encore plus car cela faisait une trotte que je ne m’étais pas rendue chez le dentiste !

    ‘Mais bon’, j’ai pensé, ‘faut le faire faut le faire’, … surtout que gentiment mais alors gentiment, le dentiste m’avait prévenue que j’allais peut-être sentir passer la pilule…

    Ouille !!! et je l’ai sentie croyez moi ! …

    Mes amis, je ne vous dis pas… c’était comme ci il me faisait une piqûre à chaque dent… ce qui fait qu’à la troisième je me suis dit ‘ça y est je vais lui demander d’arrêter parce que je ne pourrai pas tenir le coup…’ et puis je me suis dis ‘quand même fais pas la conne, t’es quand même arrivée jusque la …’

    Alors je me suis mise à prier : ‘Seigneur fais toi-même ce détartrage… tiens la main de ce bon dentiste qui avec tout son bon vouloir ne va pas réussir à ne pas me faire mal…’

    Mes amis, croyez moi si vous voulez car Lui le veut… à l’instant même j’ai vu aparaître devant mes yeux fermés, un énorme crucifix… quand je dis énorme il était énorme… une grande croix imposante avec Jésus dessus… le visage décomposé par la douleur !

    Ah mes amis, quelle apparition ! A cette vue je me suis totalement détendue et un sourire a gagné instinctivement mes lèvres… tellement bien que le dentiste a du me rappeler à l’ordre : ‘doris ouvre grand la bouche sinon je ne pourrai pas travailler…’

    Croyez moi mes amis que dès cette minute je n’ai plus souffert… au contraire et je disais à Jésus dans mon coeur : ‘si toi Seigneur tu as pu te laisser clouer les pieds et les mains, endurer tout ce que l’on t’a fait pour MON bien… alors moi aussi j’ endurerai ce moment dans la joie pour Toi, rien que pour Toi…"

    Et ce moment chez le dentiste fut une grande JOIE !

    Suis prête à recommencer any time !

    Merci Seigneur

    Amen +

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