Comment la foi
vient-elle à nous si elle ne provient pas d’un savoir appris sur la
religion ? Est-elle forcément transmise de génération à génération ?
Peut-elle sauter une ou plusieurs générations sans disparaître ?
Je m’interroge à ce
sujet comme Alexis Jenni (« Son
visage et le tien » en 2014, ayant reçu le prix Goncourt pour son
précédent livre « L’art français de la guerre »). Moi qui aie eu dans
mon enfance quatre ans de catéchèse sans personne dans mon environnement
familial pour discuter de religion ou de la vie de l’esprit ? Comment la
foi a-t’elle pu me tomber dessus ? Alexis Jenni qui n’a jamais eu le moindre
enseignement de catéchèse a pu observer l’écrasement dans le silence de toute
sa famille sur ce thème. C’est de cela
que je voudrais parler dans cet article.
Il existe une forme
de foi très lourde qui semble interdir d’en parler. Le sujet est tabou. Les
mots semblent inopérants à l’évoquer. Cette foi là se caractérise par tout un
florilège apparent de règles morales et de contraintes de toutes sortes qui
semblent s’opposer au bonheur de vivre. La vraie joie serait pour un ailleurs
et un au-delà qui seraient éternels, à la condition de la mériter.
Mais s’il vient à
manquer un ou plusieurs chainons dans la transmission par la tradition,
n’est-il pas possible de redécouvrir en toute indépendance de la longue tradition
religieuse, une foi libérée de toute contrainte moralisante ?
Cette nouvelle
forme de foi libérée se révèle dans l’intériorité, en faisant fi des anciennes
habitudes culturelles et sociales extérieures. Sans rien renier du passé spirituel
ou du futur dans l’éternité, elle affirme que le mode d’être au présent est
essentiel et ne doit surtout pas être escamoté. Elle offre au croyant la
possibilité d’une quête active qui ne signifie nullement accumulation de savoir
mais de découverte en soi et sollicitude pour un gout de Dieu, sans qu’il soit
obligatoire de définir ce concept précisément. Cette nouvelle foi se cultive
avec la prière et les mots de la méditation. Cette foi laisse de nouveau
filtrer la parole qui donne la vie. Plus on travaille à l’appréhender, plus on
l’allège. Plus elle devient légère, plus on atteint la grâce.
Cette foi là ne se
sclérosera jamais car elle est un élan de vie à la recherche permanente de sa
source sans trop se soucier du passé ni du futur. Elle ne cherche pas du tout à
prouver, démontrer ou comprendre quoi que ce soit sur Dieu. Elle admet qu’il
existe de l’invisible qui échappe à notre raison qui se fait bien des illusions
à croire que la vérité se réduit au seul visible. Ce lâcher-prise sur l’emprise
sur monde apparent, libère la joie naturelle de son emprisonnement par la
pesanteur d’un excès de règles moralisantes.
Oserais-je dire que
cette foi se recrée d’elle même, même s’il n’y a que ténèbres et en-bas.
L’héritage de la tradition religieux devient secondaire, même s’il demeure
comme l’ossature d’un fil conducteur au travers de l’histoire de l’humanité.
Dimanche dernier,
le nouveau prêtre de notre paroisse nous exposait le sens de l’avent, période
faisant la jonction entre une
commémoration du passé (la venue du Christ parmi les hommes) et l’attente d’une
espérance (le retour du Christ dans l’Apocalypse). Je lui faisais remarquer que
le Christ était aussi dans le présent. Il me répond, oui nous ne sommes pas
totalement abandonnés. Il est dans les sacrements. Alors j’ai pensé qu’heureusement
il n’était pas exclusivement dans les sacrements car sinon je ne l’aurais
jamais rencontré.
Emylia