Entre la lecture
des deux livres récemment publiés par Maurice Bellet, celui de « Notre la
Foi en l’homme » et le second que je viens à peine de commencer sur
« l’explosion de la religion » et dont je trouve le début
exceptionnel, j’aime à me promener à mon rythme dans ce grand livre « des
voix de la Foi » de François Huguenin. J’y vagabonde déjà depuis plusieurs
années. Ces dernier temps je voyage en compagnie des chrétiens du début du XX
siècle, avec Péguy, Claudel,…
Cette semaine je me
suis arrêtée sur un extrait de Georges Bernanos dans « Jeanne relapse et
sainte ». J’y prélève quelques phrases choc qui me font beaucoup de bien.
Emylia
« Car l’heure
des saints vient toujours. Notre Église
est l’Église des saints. […] Qui ne voudrait avoir la force de courir cette
admirable aventure ? Car la sainteté est une aventure. Elle est même la
seule aventure.[…] Mais qui se met en peine des saints ? On voudrait
qu’ils fussent des vieillards pleins d’expérience et de politique, et la plupart
sont des enfants. Or l’enfance est seule contre tous.[…]. Dieu n’a pas fait
l’Église pour la prospérité des saints, mais pour qu’elle transmit leur
mémoire, pour que ne fut pas perdu, avec le divin miracle, un torrent d’honneur
et de poésie. Qu’une autre église montre ses saints. La notre est l’Église des saints.[…] Ils vécurent, ils souffrirent
comme nous. Ils furent tentés comme nous. Ils eurent leur pleine charge et plus
d’un, sans la lâcher, se coucha dessous pour mourir. […] Qui voudrait perdre sa
vie à ruminer le problème du mal, plutôt que de se jeter en avant ? Qui
refusera de libérer la terre ? Notre
Église est l’Église des saints. Tout ce grand appareil de sagesse, de
force, de souple discipline, de magnificence et de majesté n’est rien de
lui-même, si la charité ne l’anime. Mais la médiocrité n’y cherche qu’une
assurance solide contre les risques du divin. Aucun rite ne dispense d’aimer.
Nulle part ailleurs on ne voudrait imaginer seulement une telle aventure, et si
humaine d’une petite héroïne qui passe un jour tranquillement du bûcher de
l’inquisiteur en Paradis, au nez de cent cinquante théologiens. […] Notre Église est l’Église des saints.
Nous respectons les services d’intendance, la prévôté, les majors et les
cartographes, mais notre cœur est avec les gens de l’avant, notre cœur est avec
ceux qui se font tuer.
Nul d’entre nous
portant sa charge, - patrie, métier, famille,- avec nos pauvres visages creusés
par l’angoisse nos mains dures, l’énorme ennui de la vie quotidienne, du pain
chaque jour à défendre, et l’honneur de nos maisons, nul d’entre nous n’aura
jamais assez de théologie pour devenir seulement chanoine. Mais nous en savons
assez pour devenir des saints. Que d’autres administrent en paix le royaume de
Dieu ! Nous avons déjà trop à faire d’arracher chaque heure du jour, une
par une, à grand peine, chaque heure de l’interminable jour, jusqu’à l’heure
attendue, l’heure unique où Dieu daignera souffler sur sa créature exténuée.[…]
Depuis que Dieu lui-même nous visita, est-il rien en ce monde que nos saints
n’aient dû reprendre, est-il rien qu’ils ne puissent donner ? »