Pâques et la
résurrection s’éloignent un peu de notre calendrier. J’aurais pourtant voulu
présenter à temps, le résumé très convainquant qui exprime la finalité de la
première partie du dernier livre du Père Joseph Moingt « Croire au Dieu
qui vient ».
Ces citations des pages 285-286 nous plongent dans une profonde réflexion chrétienne que nous devons
méditer, sous l’éclairage de la première partie de son livre.
Question que se
pose J.M :
Quel crédit peut-on accorder à un discours du salut qui
fait miroiter une destinée future de vie éternelle, discours qui a pris
naissance dans des rêveries apocalyptiques proches du désespoir, qui s’appuie
sur l’annonce invérifiable d’une résurrection
inintelligible, qui a survécu à l’attente déçue de la venue d’un Sauveur en se
faisant porter par une religion dominatrice, maintenant devenue
essoufflée ? Et quel peut être le sens d’un salut qui détourne des
réalités présentes et des combats nécessaires à la poursuite de l’aventure
humaine ?
La réponse, inspirée d’une réponse du Christ aux
interrogations de St Pierre :
La persévérance dans la foi vient en réalité de l’appel
qu’il lui a adressé jadis : la foi se nourrit de l’espérance qu’elle
soutient et qu’elle fait naitre et suscite toujours à nouveau.
La croyance à la résurrection de Jésus n’a jamais eu
d’autres sources que de la foi et de l’espérance. Il est vain d’en chercher
quelque preuve historique par-dessous les récits évangéliques, ou de se
demander sous quelle forme il a pu se faire voir à nouveau après sa mort. Sa résurrection
n’a pas été un événement survenu quelques temps après sa mort, ce fut le
retournement de sa mort en vie éternelle, sa disparition dans l’invisibilité de
Dieu, et c’est ce que signifie cette découverte du tombeau vide. Ce qu’elle a
eu d’événementiel s’est produit dans l’esprit en même temps que dans
l’existence des disciples, dans le choc qu’ils ont ressenti en percevant la
présence de Jésus qui venait à leur rencontre en surgissant, non plus du passé
où ils l’avaient connus et déjà l’enfermaient, mais du futur où ils hésitaient
à le reconnaître et où il les appelaient à déchiffrer sa nouveauté en allant
eux-mêmes au-devant de visages nouveaux à travers le vaste monde. Confesser sa résurrection
n’est pas proclamer un événement du passé qui aurait échappé à l’observation
historique, c’est annoncer un présent, annoncer qu’il est vivant en Dieu, mais
vivant d’une vie nouvelle, divine, ce qu’ont fait les apôtres en lui donnant le
nom de Seigneur. L’affirmation de la foi porte sur la personne de Jésus, sur la
réalité permanente de son être en Dieu, non sur un fait transitoire. Elle porte aussi sur Dieu, en se retournant
vers nous : Dieu est l’ennemi de la mort, il en est le vainqueur, il est
source de vie, il nous appelle, à travers Jésus, à la vie éternelle, et
c’est là où sa résurrection prend tout son sens pour nous en devenant parole
intelligible, appel à vivre, à faire confiance à la vie qui s ‘écoule en
l’éternité, « parole de vie éternelle ».
C’est la parole que les apôtres ont entendue et que nous
recevons de ceux à qui ils l’ont transmise, c’est l’Évangile, la bonne
nouvelle, toujours actuelle, que la vie triomphe de la mort, qu’il faut se
confier à son incessant renouvellement par Dieu.
La résurrection de Jésus n’a-t’elle pas été pour eux que
parole imaginaire ? Non, car ils ont pu l’identifier comme une parole déjà
entendue et l’expérimenter comme un choc, comme une aventure toute neuve, une
blessure dans leur vie, qui les propulsait sur les routes du monde de la même
façon qu’elle les avait arraché jadis à leur familles, à leur métiers, qui
retournait leur passé en avenir en les chargeant de la mission dont Jésus se
déchargeait sur eux.
Il en va de même pour nous si la résurrection ne demeure
pas dans notre esprit à l’état de croyance, mais devient engagement de
vie : elle est l’expérience d’une vie autre, de la vie d’un autre en nous.
La résurrection de Jésus n’a jamais été exprimée qu’en esprit et il ne pouvait
en être autrement. Mais cette présence est éprouvée par le croyant comme un
tournant de la vie et elle est appréhendée en l’Église, dans une expérience de
communication et de communion : c’est la trace laissée par la résurrection
dans l’histoire de chacun et dans celle d’un groupe humain. On croit à la résurrection
de Jésus dont témoignent les apôtres quand on ressent et parce qu’on ressent le
même choc dont témoigne leur vie et que confirme la foi venue jusqu’à nous et vécue
autour de nous.
(Que pourrais-je
ajouter ? Vraiment rien de plus ! )
Bonsoir Emylia ,
RépondreSupprimerLe premier paragraphe de votre article me parait un constat bien sévère. J'espère que l'Eglise actuelle n'en est pas là. Si elle s'essouffle dans nos pays occidentaux, ce n'est pas le cas partout. Pensons aux chrétiens persécutés en ce moment, que vous-même évoquiez il y a peu de temps. Ils n'accepteraient pas autant de souffrances au nom de leur foi si elle ne portait qu'une illusion.
Joseph Moingt grossit le trait sans doute pour introduire le renouveau qu'il propose. Il emprunte le raisonnement de ceux , nombreux il est vrai ,qui ont quitté l'Eglise parce qu'ils lui font ces griefs, exposés dans ce paragraphe.
Il veut réenchanter la foi par un "nettoyage" du contenu du Credo.
Avez vous compris sa démarche ainsi, comme moi?
Je pourrais reprendre ce début du texte que vous citez en contestant plusieurs points. Serait-ce utile?J'en doute. Je veux dire toutefois que je n'ai jamais pensé que le sens du salut proposé par l'Eglise détourne des réalités présentes ni des combats nécessaires à la poursuite de l'aventure humaine. Bien au contraire ! ! !
Si c'était le cas, je ne serais plus chrétienne non plus, et je comprends que ceux qui ont cette idée finissent par quitter l'Eglise. Mais le concile Vatican II , il y a déjà 50 ans, a été clair et cette façon de voir trop répandue avant sa tenue a été rejetée. Les encycliques de Jean XXIII et Paul VI sont de magnifiques engagements et encouragements à s'engager dans des combats bien concrets au service " de l'homme et de tout l'homme" (Paul VI). S'il y a quelque chose à regretter, c'est que ces ouvertures sur le monde des hommes, sur les réalités concrètes de notre temps, n'aient pas été enseignées et donc mises assez mises en action. Il y a eu des résultats tout de même.
Rien que cette phrase, ce sujet mériterait tant de développements !
Le livre de J. Moingt me donne beaucoup de fil à retordre. Le texte que vous nous proposez à la suite de ce 1er paragraphe parait transparent et en effet, comme vous l'écrivez, que pourrait on ajouter ?( Mais dans le livre , J. Moingt déconstruit peu à peu des bases auxquelles personnellement (je parle en mon nom) je tiens beaucoup.
Entêtement de ma part ? J'espère que non. En tout cas cette lecture me fait prendre bien conscience des vérités de foi auxquelles je tiens vraiment. J'accepte cependant de les réinterroger.
Je vous ai déjà dit que je suis aussi pour une foi critique . J'essaierai de préciser ce que j'entends par là.
J'ai eu la mauvaise idée de commander le livre en version numérique. Ce n'est pas l'idéal pour ce genre de livre. Je ne peux même pas vous dire à quelle page je suis rendue. J'ai bien entamé la partie
"Du Père Tout-Puissant au Dieu 'philanthrope' "
Il fallait que je vous dise tout cela en toute franchise sinon notre dialogue est inutile, j'espère que vous le comprendrez.
Bonne soirée.
Thérèse.
L'expression exacte dans Populorum Progessio, encyclique de Paul VI est:
RépondreSupprimer"Tout homme et tout l'homme". Je n'ai plus le texte, hélas, mais j'ai retenu ceci, comme beaucoup, de mémoire.
Je voudrais dire aussi qu'entre l'indifférence qui a gagné nos pays occidentaux et l'engagement jusqu'au martyre dans d'autre pays il y a aussi des pays où on peut vivre une foi profonde dans la joie et la sérénité. Nous sommes tous contemporains et vivons dans la Communion Des Saints. Notre contexte est bien différent selon l'endroit où la vie (ou la Providence) nous a placés. Juger de l'état de l'Eglise d'après seulement un contexte me parait fausser les choses, même si je regrette énormément ce qui se passe dans trop d'endroits.... bien évidemment !
Thérèse.
Bonjour Thérèse,
RépondreSupprimerJe vous remercie pour votre long commentaire qui a du être difficile à taper en raison de vos soucis de santé.
De mon coté j’ai quelques problèmes matériels. La semaine dernière, après m’être levée à 4h00 du matin pour prendre un avion, j’ai failli en oublier mon ordinateur au contrôle de sécurité d’un aéroport. Et aujourd’hui, il vient d’avoir une panne matérielle assez grave (il ne boote plus). J’écris donc ce texte sur un ordinateur qu’un collègue m’a prêté. Cet ordinateur a un clavier QWERTY (anglais). Il n’a pas les lettres accentuées en français. Je suis très gênée et ralentie dans l’écriture de mes textes.
Vous avez raison de dire qu’une version papier est vraiment très utile. Je souligne de nombreuses phrases et citations dans les pages du livre. Il y a peu de livres pour lesquels je note de nombreux passages. Je sais que j’aurai besoin d’y revenir de temps en temps pour réfléchir ou méditer.
Le texte que je cite se situe à la fin chapitre 2, à peu près à la moitié du livre. La première moitié du livre couvre les religions du début de l’histoire de l’humanité jusqu’à la résurrection du Christ. La seconde moitié est consacrée au Christianisme, de la période apostolique jusqu’à nos jours.
Je suis persuadée que vous partagez pleinement la pensée de Joseph Moingt du premier paragraphe, parce qu’il exagère volontairement certains propos de notre époque qui prétendent à l’inutilité des religions et même leur coté obsolète, voire néfaste dans notre modernité. Evidemment, il s’agit la de réaliser une figure de style pour mieux démontrer l’absurdité d’un tel raisonnement.
Il démontre donc l’absurdité de cette thèse. Il veut démontrer que la théologie qui ne perd pas de vue le présent, est essentielle pour une religion qui doit s’adapter à notre époque. Aujourd’hui plus que jamais, une religion véritablement authentique peut constituer un rempart (comme un garde corps qui protège du vide) pour éviter de plonger dans un délitement ou la désintégration de notre civilisation dans une folie barbare.
J’aime bien sa façon d’expliquer la perception du concept de Dieu et son évolution au cours de l’histoire des hommes. Mon crédo a toujours été de comprendre la genèse des pensées et de la foi, autant à titre personnel qu`à titre collectif, aussi bien dans le temps que dans l’espace.
Evidemment, ce texte trouve une résonnance très particulière à un moment où des intégristes se permettent de décrédibiliser toutes les religions, pour assouvir leur fantasme de pouvoir par le meurtre en masse d’innocents.
Il ne faut pas se voiler la face, aujourd’hui des chrétiens sont massacrés en masse, comme ils ont été persécutés parfois à certaines périodes dans l’empire romain et surtout comme ont été massacrés les arméniens par les intégristes turcs musulmans il y a exactement un siècle, lors du premier génocide du XX siècle.
En ce moment, je réfléchis beaucoup aux mécanismes qui conduisent aux génocides (préméditation du crime, organisation minutieuse, circonstances opportunes, complicités et indifférences coupables).
Pour rajouter une dernière chose, je ne pense pas que J.M. cherche à nettoyer le credo, mais plutôt à l’éclairer, pour comprendre pourquoi les ecclésiastiques du 4ieme siècle l’ont écrit, comment il a été compris tout au long des siècles, et ce qu’il signifie pour nous aujourd’hui.
Je veux juste souligner que Maurice Bellet a écrit récemment tout un livre sur le credo, non pas pour le démonter, mais pour l’affirmer d’une façon intelligible pour notre époque contemporaine. Je ne suis pas encore arrivée au sujet du credo dans le livre de J.M.
Je pense que ces deux auteurs promeuvent une foi critique, dans le sens où il s’agit d’une véritable foi qui pense sans obéir aveuglement à une injonction de la part d’un pouvoir seulement humain, aux ambitions médiocrement humaines. Encore une fois, la situation actuelle nous démontre qu’il ne faut jamais renoncer à la pensée.
Je vous souhaite également une bonne soirée.
Emylia