Il y a quelques
semaines, je relatais mon trouble ressenti face à un excès de messes et surtout
une durée extrêmement longue de ces messes en soirée (presque trois heures), durant
la période Pascale.
Je comprends bien
qu’il faille commémorer, faire mémoire, anamnèse. Mais à partir de quel excès de
cérémonies risque t’on de s’attacher plus à la célébration elle même, à son
organisation, son déroulement, la perfection de son exécution plutôt qu’à
l’événement religieux sous-jacent. Je sentais bien qu’il y avait un risque
d’idolâtrie quand la forme en vient à masquer le fond.
Il y a aussi la
question de la représentation religieuse, les images permises ou interdites sur
le Christ ou même Dieu, avec la question évidente « comment peut-t’on tuer au
nom d’images supposées être blasphématoires ? ». Si Dieu veut être
aimé, il n’a cependant jamais demandé aux hommes de faire justice à sa place.
Aussi j’ai été très
contente de pouvoir écouter aux « Racines
du ciel », Jean-Yves Leloup, un
religieux orthodoxe, sur ce sujet.
Et j’ai trouvé particulièrement
pertinente la comparaison de deux comportements qui semblent a priori opposés,
l’athéisme et la religiosité excessive, alors qu’ils dénotent une similarité
dans leur rigidité commune qui ne sait pas percevoir l’invisible au delà du
visible.
Les athées ont
parfaitement raison de rejeter le comportement de certains croyants qui lui
renvoient une image de Dieu dégradée qu’ils ne peuvent accepter. Les certains
dévots s’attachent peut être un peu trop aux aspects matériels de la religion
ou bien aux rituels en délaissant quelque peu l’élévation spirituelle de l’âme.
Ce que Jean-Yves Leloup leurs reprocherait, c’est de trop s’attacher aux
évidences visibles et de ne pas se donner la peine de rechercher l’invisible
qui crève les yeux de sa présence au cœur du visible, de ne pas savoir dépasser
les évidences pour aller subtilement plus loin.
Une autre idolâtrie
évidente est celle de la raison. Je me suis souvent interrogée sur ce qui me
poussait à lire de nombreux textes. Il ne me semble pas que j’idolâtre ni la
forme ni le fond des textes, car ce qui m’importe, c’est de nourrir ma foi, effectivement
d’être plus sensible à l’invisible au cœur du visible. Croire à l’absolu de la
raison conduit à l’erreur et à la tyrannie. Le grand risque, c’est d’adhérer à
des schémas de pensée automatique qui évite d’avoir à penser vraiment,
c’est-à-dire d’adhérer de façon aveugle à des dogmes qui brident la liberté de
l’homme de choisir selon son propre discernement. Ces dogmes risquent
d’asservir bien plus qu’ils ne libèrent. Ils permettent de condamner
automatiquement les contrevenants sans donner le droit aux accusés de leur
défense, avec l’examen des cas particuliers des éventuelles circonstances atténuantes.
J’en conviens que
ces injonctions à l’obéissance ne sont pas le propre des religions révélées et
que notre société laïque est aussi fondée sur tout un ensemble d’idéologies et
d’utopies irrationnelles, pour ne pas dire un catéchisme politico-économico-social
convenu.
Actuellement, je
suis en train de lire un livre sur la période de la naissance du
christianisme. Il est à peine croyable
que des chrétiens aient pu s’affronter à mort sur des concepts sur la nature du
Christ au cours de mémorables conciles et que ces réunions de conciliations aient
dégénéré en condamnation pour hérésies. À cette époque la raison dogmatique et
théoricienne en matière religieuse était adulée.
Aujourd’hui, c’est
plutôt le manque de réflexion sur le sujet de la foi qui nous assaille.
Paradoxalement, nous n’arrêtons pas de discuter de religion, essentiellement sur
des thématiques seulement matérielles et temporelles.
L’idolâtrie est donc
une cécité qui empêche de voir ce qui existe au delà des évidences, ce qui est
présent dans le réel. L’idolâtrie est une autolimitation qui empêche d’éprouver
pleinement cette expérience d’une vie capable de se transcender en découvrant
la Foi dans le Christ, et donc de réaliser que tout ce chemin de vie n’est pas
vain.
Emylia
Bonjour Emylia et ...toutes et tous, ami(e)s qui passez par là,
RépondreSupprimerMerci Emylia pour l'occasion que vous nous offrez d'écouter cette émission. Je l'ai trouvée TRES intéressante. J'ai beaucoup aimé les réponses de J.- Y. Leloup.
Je le rejoins tout à fait dans l'explication qu'il donne du dogme: une ouverture. Dans ce qu'il dit aussi de Maître Eckart, pas toujours facile à lire mais toujours étonnant : faire se rejoindre les contraires, ce que lui-même, J.- Y. Le loup, fait très bien.
Cela m'a rappelé ce qu'écrivait le Père F. Varillon dans un de ses livres: le christianisme est plein de paradoxes et souvent en effet, ce qui semble absurde ne tient que grâce à son contraire .Il y a eu une époque où ça me frappait beaucoup.
Tout cela demande à être médité et j'en aurai pour toute la semaine.
Fameux commentaire, d'une des lectures de la messe de ce jour même, 17 mai : (1ère lettre de Saint Jean, 4,11-16)où on entend (lit): "Dieu, personne ne l'a jamais vu". Il est question dans cette lettre de l'Esprit. Il me semble qu'on ne peut pas tomber vraiment dans l'idolâtrie quand on s'attache à chercher la lumière de l'Esprit et non à dire la vérité entière, définitive et absolue.
"L'Esprit souffle où il veut. Nul ne sait d'où il vient ni où il va, mais on entend sa voix"
Il ne nous abandonne pas à nos spéculation hasardeuses, on entend sa voix.. Il ne se laisse pas enfermer mais il nous guide quand on le lui demande..".dans le souffle d'une brise légère". Il ne faut pas être trop bruyant pour avoir des chances de l'entendre.
Bon dimanche. Bonne semaine.
Thérèse.
Bonjour Thérèse,
RépondreSupprimerOui, vous avez raison, j'ai oublié de le dire dans mon article, aller au delà des apparences du visible, c'est aller à la rencontre de l'esprit saint qui ne se voit pas avec des seuls yeux de chair.
Bonne soirée.
Emylia
Bonjour,
RépondreSupprimerL'autre jour je disais que le christianisme est riche en paradoxes. J'en ai eu la confirmation et des exemples en écoutant Jean-François Colissimo à l'émission "Les racines du ciel "du 3 / 0:5 sur France culture."
Il parlait, à l'occasion de la sortie de son dernier livre, des Chrétiens Orientaux .
Il a d'abord expliqué ce qui fait la différence entre ceux-ci, les orthodoxes notamment, et les catholiques.. Je me suis dit, en l'écoutant, que nous aurions tout intérêt à nous inspirer de cette spiritualité pour retrouver du souffle et du dynamisme. Le thème de la divinisation de l'homme est un sujet qui m'est cher depuis que j'en ai entendu parler ...à un âge déjà bien avancé (plus de 50 ans sans doute, je ne sais plus), tellement il était peu abordé dans notre monde catholique. Il l'est un peu plus maintenant mais de façon encore timide.
Les explications de J. F. Colissimo donnent une idée de la grandeur du christianisme qu'on devrait retrouver, non pour pavoiser mais pour en vivre.
La fin de l'émission porte sur le martyr actuel des Chrétiens d'Orient et les conséquences dramatiques que leur disparition entraînerait .pour eux mais aussi pour nous, Occidentaux.
Je ne sais pas bien écrire le lien sur lequel cliquer pour écouter l'émission comme vous le faites, Emylia. Si vous le souhaitez, je vous laisse vous en occuper. Merci.
Bonne soirée.
Thérèse.
Bonjour Thérèse,
RépondreSupprimerMoi aussi j'ai découvert ce concept de divinisation de l'homme en parallèle à celui de l'humanisation de Dieu
chez Luc Ferry (il a écrit une petit livre sur ce thème) il y a quelques années.
Merci pour l'information sur cette emission dont voici le lien :
http://www.franceculture.fr/emission-les-racines-du-ciel-les-chretiens-d-orient-avec-jean-francois-colosimo-2015-05-03
Je vais bientôt l'écouter.
Je trouve que la religion orthodoxe a une approche interessante de la spiritualité.
D'ailleurs Bertrand Vergely est bien orthodoxe.
Juste un petit mot supplémentaire : j'ai écouté André Comte-Sponville. Je ne peux que le recommender si l'on est pas déprimé. Alors prudence !
Bonne journée.
Emylia
Merci Emylia,
RépondreSupprimerJe voudrais demander aux personnes que j'ai pu heurter de m'excuser. Je ne trouve pas que 50 ans est un âge avancé , loin de là, mais pour le sujet que j'abordais - l'humanisation de Dieu et la divinisation de l'homme - en entendre parler seulement à cet âge alors que j'avais eu des cours de catéchisme depuis toujours ( et jusqu'au bac), cela a été une surprise...une bonne surprise.
Je suis d'ailleurs de plus en plus concentrée sur l'idée de l'Incarnation, sur ce qu'elle signifie pour le Christ et pour nous. J'ai envie de creuser cette idée et l'émission m'y poussait encore..
J. M. Colosimo cite dans cette émission la déclaration de St Irénée, cette déclaration qui m'a paru tellement inouïe quand je l'ai entendue la 1ère fois !
" Dieu s'est fait homme pour que l'homme devienne Dieu"
Bonsoir.
Thérèse.
Petite correction:
RépondreSupprimerRendons à César ce qui...Je me suis trompée, c'est Frédéric Lenoir qui fait cette citation de St irénée, approuvé par Colosimo
Th.
Bonjour Thérèse,
RépondreSupprimerJ'ai bien aimé l'emission radiophonique de Jean-Francois-Colosimo. Elle donne beaucoup de matière à penser.
Elle m'a beaucoup appris sur les chrétiens du proche Orient et la grande différence entre notre
histoire d'un christianisme évangélisateur conquérant et leur christianisme humble, respectueux de l'altérité, miséricordieux, au cœur de populations musulmanes. L'Orient leur doit beaucoup d'avoir préserver une certaine vision de l'humanisme divin dans une région rarement pacifiée. Nous ne réalisons pas suffisamment quelle
partie de nous même nous perdrions s'ils venaient à disparaitre.
Ce serait un drame pour l'humanité entière comme l'est al disparition de tout peuple.
À quoi bon regretter la disparition d'espèces animales quand on oublie de mesurer la gravité de l'extinction d'une civilisation (donc de personnes humaines) qui a beaucoup apporté au monde, dans la discrétion.
Il y a bien plus grave que le taux de PIB et de CAC40 ou de DOW JOHNES !
Mais ce qui n'est pas mesuré sert d'alibi à l'oubli.
Bonne journée à vous.
Emylia