Cette semaine, je
savais que je ne pourrais pas trouver suffisamment de temps pour poursuivre ma
lecture du livre de Joseph Moingt qui demande beaucoup de temps et de
concentration pour bien suivre la profonde logique de l’argumentation de
l’auteur.
Aussi j’ai
poursuivi avec une grande satisfaction ma lecture du livre de Pierre-Marie
Beaude dans la « Bible de Lucile »), qui commente avec une habile
finesse, les différents textes de la Bible, les plus pertinents comme les plus étranges
et embarrassants.
Revenons au
chapitre de l’Exode. Reconnaissons la grande sagesse spirituelle des « dix
commandements » de l’Exode 20, la Parole du Seigneur ! Mais que faire
de toutes les prescriptions supplémentaires et rites multiples qui contraignent
de façon excessive le mode de vie des Hébreux. Il y en a tellement qu’il y a de
quoi perdre de vue le sens moral et spirituel de l’essentiel. Et ces
prescriptions sont développées encore plus extensivement dans le Lévitique, le
parfait manuel utilisateur pour procéder aux sacrifices d’animaux, ou le
dictionnaire des définitions des normes alimentaires et hygiéniques…
Mais qui suis-je,
femme du XX et XXI siècle pour prétendre appréhender la culture religieuse de
l’époque antique où ont été écrits ces textes bibliques. À mon époque contemporaine, je suis nourrie
de textes de logique et de raison critique écrits dans des livres appelés
« essais ». L’ancien testament lui a été écrit principalement du VIII
siècle au VII avant JC puis complété du VI-II siècles dans un environnement
culturel grec. Les hommes de l’antiquité vivent dans une autre culture où règne
un autre mode de pensée, celui de l’allégorie. L’allégorie favorise une
transition astucieuse entre la mythologie et la philosophie, c’est –à-dire
entre un schéma narratif d’une histoire brute à une élévation de l’esprit ou de l’âme au dessus
des nécessités matérielles. Le philosophe Platon est l’un des grands maitres de
cette interprétation du sens philosophique et spirituel des mythes. Probablement Socrate avait compris avant Platon,
le véritable sens spirituel de la religion au delà des rites officiels de la
cité (Socrate a précisément été condamné et exécuté pour cette raison).
L’interprétation
allégorique s’applique aussi à ces textes de la bible. Le philosophe juif Philon
d’Alexandrie (contemporain de Jésus-Christ) réalise la synthèse de l’esprit
spirituel de l’ancien testament avec la philosophie grecque. Les textes de
l’ancien ne doivent pas être lus uniquement selon la lettre, mais aussi selon
un second second sens, celui de l’esprit.
Il faut prendre
l’évolution de la compréhension des textes de l’ancien testament par analogie
avec le développement de la maturité d’un être humain. Un homme jeune est par
nature très tourné vers les choses pesantes du corps. Mais l’âge, il murit. Son
esprit devrait alors s’éveiller et son âme s’élever en s’affranchissant des
pesanteurs du corps. Et donc ces textes prescriptifs de la bible devraient être
interprétés allégoriquement comme un travail intérieur que réalise l’homme pour
la purification de son âme et son offrande à Dieu :
« Pour un philosophe helléniste comme Philon, l’homme
est composé d’un corps et d’une âme. De même, un texte sacré est composé d’un
sens corporel et d’un sens de l’âme, qu’on appelle un sens spirituel ou
allégorique. Le sens corporel est celui que l’on retire immédiatement de
la lecture de la lettre ; le sens spirituel ou allégorique est celui que l’on
retire en étant attentif à ce qui est caché dans le corps, à savoir l’esprit ou
l’âme.»
Quand on comprend à
quel point la culture grecque a été capable de comprendre la profondeur
philosophique de l’ancien testament, il devient évident que le Christianisme ne
pouvait que s’épanouir sur le terreau de cette culture.
La culture grecque
a permis la rédaction des évangiles. Les textes des évangiles sont imprégnés
d’allégories exprimées sous la forme des paraboles du Christ.
La culture
judéo-chrétienne est indissociable de la culture gréco-romaine !
Emylia