Il est difficile de
comprendre et interpréter la bible sans avoir appris et compris la véritable
histoire antique du peuple hébraïque.
La dernière fois,
je vous ai laissé au VIII siècle, avec une énigmatique division du peuple
hébraïque en deux royaumes en concurrence, l’un au Nord richement doté en terres
fertiles (culture de l’olive) et donc très prospère appelé le royaume d’Israël
et l’autre au Sud, le royaume de Juda, plutôt pauvre avec des terres arides et
donc peu versé au commerce avec ses voisins. La grandeur et le prestige du
royaume d’Israël contraste avec la misère et peut être l’insignifiance du
royaume de Juda (encore en débat parmi les chercheurs). Cette concurrence est
évidente dans la bible, car l’anathème est systématiquement jeté sans
complaisance sur tous les rois du Nord, accusés d’impiété et d’infidélité pour
adopter en plus de leur Dieu Yahvé, les Dieux des peuples avec lesquels ils
commercent et donc se mélangent. Globalement les rois du Sud semblent en
apparence biblique, plus fidèles au Dieu unique. Il faut comprendre que les
textes des livres des rois ont été écrits, après que le royaume d’Israël ait
été totalement effacé de la carte par les assyriens au VIII avant JC. Il est
vrai que la richesse stimule la convoitise alors que la pauvreté n’intéresse
pas. La pauvreté peut protéger des prédateurs, mais pas toujours. Donc au VII
siècle, le royaume de Juda reste le seul héritier de l’ancien peuple hébraïque.
Les réfugiés qui affluent du Nord vers le royaume de Juda contribuant à l’essor
démographique, économique et culturel de ce dernier. La prospérité et le
prestige du royaume de Juda ne vont pas durer car ils attisent inévitablement la
convoitise de l’Assyrie, puis de la Mésopotamie (Babylone).
Cela conduit
inévitablement au désastre du second exil, avec la déportation au VI siècle de
l’élite judéenne à Babylone, la destruction de Jérusalem dont le temple de
Salomon. Mais ce que nous enseigne ce drame, c’est que paradoxalement ce n’est
pas la fin. C’est même peut être le véritable début de l’Histoire biblique. Je
veux dire que les exilés vont n’avoir de cesse que l’obsession de se remettre
en cause et de leur exil, garder ou de retrouver à tous prix leur identité
profonde. Je pense que cette obsession de l’identité de soi (il ne s’agit pas ici
d’identité de race ethnique) conduit à la foi véritable. Cette foi, ce besoin
de comprendre et de faire mémoire conduit à écrire ou réécrire les anciennes
transmissions orales ou écrites dans le but de les transmettre, pour ne jamais oublier son identité donc son
Dieu.
L’exil ne durera
pas très longtemps. Les exilés vont avoir cette chance immense de pouvoir
retourner à Jérusalem. Le second exode a provoqué un ébranlement et examen de
conscience considérable qui a permis la véritable naissance du monothéisme
unanimement accepté par les survivants de Juda, le peuple Juif.
Dans le film que
j’ai indiqué dans le précédent article, j’ai relevé les arguments essentiels
que j’ai traduits ci-dessous :
Quelles sont les
motivations pour essayer de comprendre
dans quelles conditions la bible a été rédigée par les hébreux ? Pourquoi ces textes sont si
extraordinaires ? Que veulent-ils nous signifier ? Comment avons nous
pu hériter de ce livre ?
Nous devons fondamentalement
connaître les origines de la bible pour être dans la capacité comprendre sa
propre représentation de l’Histoire.
Si l’on pouvait
savoir d’où vient le livre ? Qui en sont les auteurs ? Pourquoi
l’histoire est ainsi racontée ?
Pourquoi vouloir
connaître cela à tous prix ?
·
Parce qu’Ils ont inventé l’idée d’un seul Dieu,
·
Parce qu’ils ont inventé l’histoire écrite,
·
Parce qu’ils ont inventé l’idée de la personne individuelle singulière
avec des droits et des responsabilités et devoirs moraux.
Ces devoirs moraux
sont consignés explicitement dans le Deutéronome. Ils définissent une sagesse
morale sans équivalent dans le monde à cette époque.
Ce Deutéronome qui
aurait été écrit par le mythique Moise remonte avec une quasi-certitude au
règne du pieux roi Josias de Juda qui régnait avant le second exil (le
Deutéronome a été redécouvert dans le temple sous son règne, après avoir été
oublié pendant des siècles. Josias a imposé les réformes nécessaires pour faire
respecter les lois deutéronomiques).
Le deutéronome
énonce les droits civiques de l’individu, les droits humains de la
personne : protéger les plus faibles, les femmes, les enfants, les veuves,
les orphelins, les esclaves.
Ces règles ont
induit des changement idéologiques et religieux radicaux qui ont eu un impact
social considérable. Elles ont permis l’émergence de la cellule familiale
restreinte (un père, une mère et les enfants) telle que nous la connaissons
encore aujourd’hui avec le respect du développement de l’individualité de la
personne (mais pas celui de l’individualisme égoïste).
Ces concepts novateurs
sont les fondements de plus de deux millénaires de notre civilisation
occidentale-chrétienne fondée sur le monothéisme.
Une nouvelle
conscience révolutionnaire à la fin du 7ème siècle avant JC. Cette conscience
reconnaît la dignité humaine à tous les hommes quelque soit leur situation
sociale.
Ces propos de savants archéologues ou biblistes sont
très forts. Ils n’apparaissent pas aussi clairement dans le très intéressant
reportage d’ARTE que j’ai retrouvé mais qui apporte un éclairage très
complémentaire. Je vous recommande donc ce second reportage, notamment cette
étrange expérience divine du peuple des Shasous (prononcé «
chassous ») ayant fui hors d’Égypte, peut être les véritables exilés
de Moise, ainsi que l’explication très claire de cette écriture biblique qui a
été partagée par la succession de groupes d'une centaine de scribes sur presque 1000 ans. Bonne écoute.
Emylia
Emylia